mardi 19 septembre 2017

Triste bilan du quinquennat Hollande

Stéphane Le Foll, ancien porte-parole du gouvernement et ministre de l’Agriculture, se penche dans les médias sur l’avenir du parti socialiste dont il espère bien prendre la tête. On est stupéfait de voir que celui qui a soutenu et œuvré depuis la première heure aux côtés d’un Président qui n’a même pas osé se présenter peut avoir le culot d’envisager de reconquérir le pouvoir. Si le parti socialiste peut renaître c’est en tout cas avec une nouvelle génération. Il faut d’abord se poser la question de l’utilité d’un parti qui ne tient plus qu’au mot « égalité » dans le triptyque « liberté, égalité, fraternité » et encore ! Le social-libéralisme n’a pas réellement cet objectif quand il mise sur les aides publiques au Medef et pond la loi travail de l’UE. Ces élites veulent ignorer ce que le peuple ressent plus ou moins profondément, le constat d’échec de l’UE protectrice et solidaire. Mais le vrai clivage ne cesse de se creuser entre des peuples aux intérêts différents, voire contradictoires.


Pour ne pas traîner le boulet d’un quinquennat raté, Le Foll rejette d’un revers de main toute idée de bilan de cinq ans de pouvoir. Durant ces cinq ans, le pouvoir était quasi-monarchique avec un Parlement aux ordres et une couverture territoriale d’élus très majoritaire au niveau régional et départemental. Mais en plus la chance lui a souri avec la baisse de l’euro, du prix du baril et des taux d’intérêt, trois éléments favorables que le gouvernement précédent n’avait pas réunis, en proie en plus à une crise bancaire et financière de grande ampleur venue des Etats-Unis. Le pari de « l’inversion de la courbe du chômage » n’a pourtant pas pu être tenu et la France a continué à s’endetter. François Hollande termine l’année 2016 avec un taux de chômage de 10,1% en catégorie A des sans-emploi et place la France dans les 10 plus forts taux de chômage de l’Espace Economique Européen. La France est seulement le pays le moins mauvais du club Méditerranée, mais moins bon que ses voisins de l’Allemagne, de la Suisse, du Royaume-Uni et même de la Belgique. 

Mais on peut penser que le gouvernement a hérité d’une situation détériorée et qu’il a réussi mieux que les autres pays sur les deux indicateurs chers aux français, le taux de chômage et le PIB/habitant qui conditionne le niveau de vie de chacun. Malheureusement il n’en est rien comme le montre le graphique ci-contre représentant les variations depuis 2011 jusqu’à 2016 du taux de chômage et du PIB/habitant. On constate qu’il y a un lien fort entre le taux de chômage de la population active et le PIB/habitant selon le sens prévisible de la diminution du chômage avec l’augmentation du PIB/habitant. Cependant trois pays s’écartent sensiblement de la loi générale à savoir l’Irlande, Malte et la Roumanie.

Si l’on reprend l’étude statistique sans ces trois pays, on a un lien très fort qui nous indique que pour 10% de hausse du PIB/habitant, on a une baisse du taux de chômage de plus de 2,9%. L’augmentation annuelle du nombre d’habitants étant de 0,5%, on en déduit que 1,5% d’augmentation du PIB fait normalement gagner 0,3% sur le taux de chômage. On remarque que la France durant ce quinquennat a fait moins bien que la moyenne des pays de l’UE et même que celle de la zone euro. Elle est en retard surtout par rapport au Royaume-Uni et à l’Allemagne et même par rapport à l’Espagne et au Portugal qui ont fait plus baisser le chômage avec une augmentation comparable du PIB/habitant sur 5 ans. On note la performance des Pays Baltes et la contre-performance de la Grèce, de Chypre, mais également de l’Italie. 

Le résultat global de la France sur les deux indicateurs principaux concernant l’ensemble de la population est comparativement mauvais et ceci sans équivoque. Il reste à savoir si pendant ce quinquennat et à défaut, la France a fait mieux sur les déficits du budget de l’Etat. Le graphique ci-contre représente les variations de la dette/PIB et du PIB/habitant. On note qu’il n’y a pas de lien statistique entre les deux indicateurs. Cependant là encore la France fait moins bien que l’UE et la zone euro puisqu’elle a plus augmenté sa dette avec un PIB/habitant inférieur. On note la performance de l’Irlande et de l’Allemagne qui ont très peu augmenté la dette. C’est l’inverse pour la Grèce, mais surtout pour Chypre qui cumule baisse du PIB/habitant et forte hausse de la dette. Notons que, pour une variation de la dette du même ordre, le Royaume-Uni a beaucoup plus augmenté son PIB/habitant. L’Allemagne et le Danemark augmentent plus le PIB/habitant avec une dette inchangée ou en baisse.

Il est commun de penser que l’augmentation de la dette est liée à celle des dépenses des administrations publiques d’où la nécessité des rabots budgétaires à laquelle se livre le nouveau gouvernement. La représentation de la dette et des dépenses des administrations publiques n’apporte pas une réponse claire sur ce sujet. Si la Bulgarie, l’Estonie ont vu leur dette et leurs dépenses publiques s’envoler et la Grèce diminuer sa dette et ses dépenses publiques, ce n’est pas le cas de la Slovénie, de Chypre et de l’Espagne pour lesquels la rigueur budgétaire n’a pas empêché la dette de croître. On voit à contrario la dette diminuer et les dépenses augmenter avec l’Allemagne. La France réussit moins bien que l’ensemble de l’UE et de la zone euro ; sa dette augmente plus avec une augmentation comparable des dépenses publiques. La raison principale d’augmentation de la dette ou des déficits budgétaires est autre. Un complément d’étude est nécessaire pour déterminer si cela est dû à une insuffisance des rentrées fiscales ou à la destination des dépenses publiques différente entre les pays. 

Un autre lieu commun, cher au Medef, est la nécessaire maîtrise des coûts de main-d’œuvre et son impact négatif sur la croissance et en conséquence sur le chômage. C’est ainsi que l’on fait accepter les aides aux entreprises sous forme de diminution des charges, de crédit d’impôts et de blocage du SMIC au-delà de l’inflation. J’avais déjà montré que c’était la politique inverse qui était la bonne. Le graphique sur les variations des coûts de main-d’œuvre et du PIB/habitant sur les pays européens entre 2011 et 2016 montre que ce lien est très fort et croissant. Une augmentation de 10% du coût de main-d’œuvre entraîne une augmentation du PIB/habitant de 7,3%. La France fait encore nettement moins bien que l’UE et la zone euro durant le quinquennat Hollande avec une augmentation plus faible du coût de main-d’œuvre et du PIB/habitant. Aux deux extrêmes on retrouve Chypre et la Grèce, deux des pays de l’UE et de la zone euro où le coût de la main-d’œuvre génère le chômage et la croissance, ce qui est le marqueur d’un quinquennat raté. D’une façon générale on peut dire que la politique de l’offre se trouve injustifiée par la comparaison avec les autres pays européens. On peut même dire que les résultats ci-dessus montrent que 10% d’augmentation du coût de main-d’œuvre entraîne une augmentation du PIB/habitant de 7,3% et une diminution du taux de chômage de près de 2,2% selon ce qui se passe en moyenne dans les différents pays de l’UE. Il reste à voir quel est le type d’augmentation du coût de main-d’œuvre qui joue ce rôle, le salaire, les charges ou les impôts ? De même que sur l’origine de la dette, il reste un domaine d’exploration que nous verrons dans un prochain article.

En attendant Stéphane Le Foll, au lieu de faire des exégèses sur la définition du socialisme qui pourrait le propulser vers la prochaine présidentielle, ferait mieux de s’interroger sur les raisons de l’échec du quinquennat précédent et de se demander pourquoi les pays hors de l’UE, voire de la zone euro, ont de meilleurs résultats que la France. Nos concitoyens devraient cesser de croire à l’enfumage qui leur fait miroiter une meilleure vie en les ponctionnant pour des entreprises dont la survie n’est liée qu’à leur adaptation aux lois du marché et non aux milliards que l’Etat déverse sur eux. Comme pour l’agriculture, les subventions permanentes ne conduisent que dans une impasse en freinant l’adaptabilité au marché, elles ne doivent avoir qu’un rôle transitoire.


La politique de tirage de la couverture à soi par le Medef 

Ne vise que l’augmentation des marges des sociétés

Et le rabot sur tous les coûts de main-d’œuvre 

Est promu pour des raisons mercantiles

Loin du bonheur du peuple servile !


Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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