mercredi 10 août 2016

Énergies renouvelables ou tonneau des Danaïdes ?

Après une série consacrée au changement climatique et aux EnR, il me faut rajouter une page plus actuelle sur le financement de ces énergies qui est loin d’être négligeable et qui ne fait que commencer si le gouvernement et le suivant continuent sur la voie tracée de diminution drastique du nucléaire. La solution passe par les EnR, l’hydraulique étant au bout de ses possibilités et les énergies fossiles étant polluantes. On oublie au passage que les EnR sont des énergies intermittentes dont le développement doit être accompagné par celui des énergies fossiles, ce qui entraîne de facto l’augmentation de la pollution dont le CO2. En dehors de la preuve donnée dans les précédents articles, en comparant l’évolution entre 2014 et 2015, de la concomitance de ces évolutions, j’ai pu vérifier en Allemagne de l’Est qu’il en était bien ainsi. Les centrales à lignite ne sont jamais bien loin des fermes éoliennes et l’atmosphère en est pollué d’autant plus que le lignite est un mauvais charbon. 

Deux raisons valables seulement peuvent expliquer ce choix énergétique. La première c’est la peur du nucléaire, opinion confortée par les accidents de Tchernobyl et de Fukushima mais qui ne prend pas en compte les erreurs de conception et d’exploitation du premier et de la position particulière du Japon dans les tremblements de terre et les tsunamis associés. Si Fukushima est une catastrophe environnementale, elle a fait très peu de morts, 2 selon mes sources au contraire des deux dizaines de milliers de morts dues au tsunami qui a aussi provoqué l’arrêt du refroidissement des réacteurs à Fukushima. Enfin la France n’a jamais connu d’accident depuis cinquante ans, seulement des incidents (sans conséquence nuisible à l’homme) sur l’échelle internationale de gravité. Pourtant la France reste le pays du monde le plus nucléarisé par habitant avec une production électrique basée à 75% sur le nucléaire. La peur n’est pas partagée par tous les pays puisque des réacteurs se construisent un peu partout dans le monde. La technologie française est appréciée au Royaume-Uni et même en Chine où on va même y construire en partenariat une usine de retraitement du combustible, le La Hague chinois.

La deuxième raison serait que ces EnR soient vraiment gratuites, on ne paie ni le vent, ni le soleil. Malheureusement il n’en est rien, les éoliennes coûtent à fabriquer et à entretenir pour une durée de vie estimée à 20 ans. De plus les terrains d’implantation doivent être achetés, loués ou dédommagés. Si le kWh produit par les éoliennes était moins cher que celui produit par le nucléaire, il n’y aurait nul besoin de le subventionner. Les EnR assureraient elles-mêmes leur rentabilité. On pratique donc des allègements d’impôts pour les entreprises de ce secteur, des subventions pour les particuliers et des tarifs de rachat très avantageux de l’électricité produite en particulier pour le solaire. Tout cela a un coût pour l’État et évidemment par contrecoup pour les contribuables. On force ainsi la main des particuliers en leur faisant miroiter les gains potentiels sur la revente du courant mais on leur en reprend une partie dans les impôts, pour les autres ce n’est qu’une participation forcée aux EnR sans aucun bénéfice si ce n’est d’admirer nos paysages squattés par la ferraille et le béton. 

Dans le cadre de la transition énergétique, le gouvernement vient d'arrêter la Programmation pluriannuelle des investissements (PPI) dans l'électricité dite « renouvelable ». On y trouve pour le photovoltaïque, l'éolien terrestre et l'éolien maritime la puissance installée planifiée pour 2018 et pour 2023. Mais rien sur le coût de ces décisions. Pour chacun des trois renouvelables cités, la programmation nous donne (en milliards de watts) la puissance du parc en 2018 et en 2023 et, donc, l'augmentation de puissance décidée. On a par ailleurs des estimations (fragiles) du coût d'un investissement de 1 milliard de watts : 2 milliards d'euros pour le photovoltaïque, 1,8 pour l'éolien terrestre, 4,8 pour l'éolien maritime. On obtient ainsi le coût du programme arrêté pour les cinq années 2018-2023 : environ 48 milliards d'euros. Il faut y ajouter les dépenses d'investissement à engager pour le développement du réseau de transport de l'électricité. Comme la consommation n'augmente pas et que le réseau actuel est suffisant, les lignes nouvelles prévues (en plus des investissements de renouvellement) se justifient uniquement par la géographie nouvelle des installations de renouvelables. RTE, le responsable du réseau, estime cet investissement à 1 milliard par an, soit 5 milliards pour la période considérée. Au total, le PPI implique donc environ 53 milliards d'investissement, soit près de 11 milliards par an. C’est à 50 milliards que la Cour des Comptes évalue l’investissement à prévoir.

Le PPI prévoit une augmentation du photovoltaïque de 100% en 2018 et de 200% supplémentaires en 2023 par rapport à 2014 soit 5.292 MW supplémentaires en 2018 et 10.584 MW encore en plus en 2023 pour un total de 21.168 MW soit une superficie de 212 Km2 (2 fois la superficie de Paris). Pour l’éolien terrestre c’est 21.500 MW partant de 9.120 en 2014 et 10.312 en 2015 soit 10750 éoliennes de 2 MW sur une superficie de 430 km2 (4 fois la superficie de Paris). L’objectif intermédiaire est de 15.000 en 2018. Pour l’éolien en mer posé c’est 500 MW en 2018 et 3.000 MW en 2023 sur une superficie de 96 km2 (9/10 superficie de Paris). Le total éolien-solaire se monte à 45.700 MW auquel on ajoute 800 MW de bioénergie. Mais que va-t-on produire réellement en TWh ? Les 21.200 MW de photovoltaïque donneront par an, avec une puissance utile de 13,64% (en 2015), 25,3 TWh. L’éolien terrestre participera pour 21.500 MW, avec une puissance utile de 23,36% (en 2015), 49,7 TWh. L’éolien en mer à 3000 MW complètera, avec une puissance utile (estimée sur 3000 heures de fonctionnement) de 34,25% à hauteur de 9 TWh et la bioénergie à 800 MW, avec une puissance utile de 52,96% (en 2015), pour 3,5 TWh. Le total des EnR éolien-solaire du PPI est de 87,5 TWh soit 16% de la production au lieu de 5,2% en 2015. Il faudra bon gré mal gré ajouter aux 84 TWh intermittents des EnR éolien-solaire, 84 TWh d’énergie charbon-gaz-fuel, comme j’ai pu le faire constater dans les articles précédents. On arrive donc à un total de 171,5 TWh. Le nucléaire a produit 416,8 TWh en 2015, on ne remplacera donc que 41,1% de la puissance nucléaire soit 25976 MW.

Non seulement le pari de 50% du nucléaire n’est pas tenu, mais en réalité les EnR ne remplacent que 21% de l’énergie nucléaire et la pollution, dont le CO2, est multipliée par 3,5 par rapport à 2015. C’est 53 milliards d’investissement pour un courant plus cher et de moindre qualité. Le gain à attendre est la diminution de l’investissement sur nos centrales nucléaires. Elles ont en effet besoin d’un grand carénage dont le coût est évalué à 1 milliard par centrale. Si l’on suppose que l’on arrête 26 centrales le gain sera de 26 milliards d’euros soit 2 fois moins élevé que l’investissement des EnR. Mais dans les dépenses les subventions d’État n’ont pas été comptées. La taxe CSPE, qui a rapporté 10,647 milliards en 2015, doit y pourvoir. En 4ans, de 2012 à 2016, la taxe appliquée est passée de 10,5 €/MWh à 22,5 €/MWh soit 3€/MWh de plus chaque année. A ce rythme en 2023 elle sera de 43,5 €/MWh.

Ce chiffre est probablement sous-estimé car l’État freine l’augmentation pour des raisons politiques auprès des abonnés. SI l’on considère que les EnR éolien-solaire sont passés de 28,5 TWh en 2015 à 84 TWh prévus en 2023, alors que la CSPE était à 19,5 €/MWh en 2015, une simple proportionnalité donne 57,5 €/MWh en 2023. Le prix de l’électricité en 2015 étant à 150 €/MWh l’augmentation pour l’abonné est de 38 €/MWh (57,5-19,5) soit plus de 25% ou 27,4 milliards de plus pris aux abonnés en 2023. L'évolution de la CSPE étant linéaire, on peut dire que de 2015 à 2023, la CSPE se comporte comme si elle évoluait de 13,7 milliards par an pendant 8 ans. On atteint en 2023 la somme de 110 milliards auxquels on doit ajouter le gain de 26 milliards sur l'arrêt de 26 réacteurs nucléaires pour couvrir les subventions et les 53 milliards d'investissement. Le coût total est donc de 136 milliards Le choix des EnR c'est au bas mot 136 milliards sur 8 ans à venir soit 17 milliards/an payés par le contribuable ! 

Si l’on regarde ce qui se passe en Allemagne, cette estimation est sans doute très minorée. Là-bas en 2013 elle avait augmenté de 47% en un an. La durée de vie de nos centrales nucléaires a été repoussée de 20 ans, celles américaines de 30 ans, mais la durée de vie des éoliennes n'est que de 20 ans. On ne gagne rien non plus de ce côté là. Il faut ajouter à tout cela le coût de démantèlement des réacteurs nucléaires estimée à 13 milliards par réacteur en 2012 par la Cour des Comptes soit 338 milliards pour 26 réacteurs arrêtés avant leur fin de vie. Cette dépense est intégrée dans le coût du kWh à hauteur du 15% mais cela n'implique pas que ces sommes soient disponibles... Notre plan énergétique électrique est tout simplement débile économiquement, hors des objectifs et polluant. Mais les raisons de ce choix pour la peur du nucléaire et pour l’énergie gratuite sont de la communication politique, car il y a une troisième raison, une vraie raison à ce choix, et nous en parlerons dans un prochain article. 

Il n’y a aucune raison économique et écologique 

De se lancer dans cet investissement inutile

Dont on sait qu’il ne peut être rentabilisé 

Alors que la France dispose d’un parc

Donnant une électricité moins chère 

Plus fiable, de bonne qualité ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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