mercredi 13 avril 2016

La grande misère de l’Éducation Nationale !


Je ne peux laisser passer la déclaration de notre Ministre de l’Éducation Nationale à la sortie du Conseil des ministres du mercredi 13 avril 2015 sans réagir. Interrogée sur l’absentéisme des enseignants et leur non-remplacement, la Ministre a dégagé en touche en rejetant la faute sur le gouvernement précédent. Cette désinvolture mérite que nous disions à cette Ministre qu’elle a pris une situation en effet dégradée sur ce point puisque 2000 postes de remplaçants avaient été supprimés. Depuis 2700 ont été recrutés. Mais le constat est que depuis quatre ans, la situation ne s’est pas améliorée en particulier dans des zones difficiles d’éducation où les enseignants sont mis à rude épreuve. Or le candidat Hollande avait proclamé d’une part que la jeunesse serait sa priorité et que 60.000 postes supplémentaires seraient créés dans l’Éducation Nationale. Où sont passés ces 60.000 postes dans l’Administration ou dans l’enseignement ? 

Madame la Ministre vous en êtes responsable. Vous vous êtes beaucoup investie dans les réformes, dans la théorie du genre, dans l’enseignement de la citoyenneté, dans le développement de l’esprit critique pour lutter contre la désinformation. Tous enseignements dont on est sûr qu’ils vont faire remonter la qualité de notre enseignement dans les statistiques internationales. Il aurait mieux valu, au lieu de perturber les programmes, les horaires, en rajoutant de plus des tâches d’enseignement nouvelles, que vous vous occupiez de donner aux élèves le temps d’enseignement nécessaire à l’étude de chaque discipline de base. Cette manie de vouloir toujours réformer avant même que les réformes précédentes aient pu être digérées par les enseignants n’a cessé de dégrader la qualité de notre enseignement et vous y prenez de nouveau une large part. 

Vous connaissiez la situation qui avait été mise en lumière par votre prédécesseur Vincent Peillon lequel avait rendu public un rapport sur le problème des remplacements. Il avait déjà donné lieu à de nombreuses manifestations souvent locales et dont le retentissement n’atteignait visiblement pas les médias nationaux et votre Ministère. Quand il s’agit de la zone parisienne, l’écho se fait entendre et la vérité éclate. Vous n’avez rien fait d’efficace dans ce domaine, alors ne cherchez pas l’excuse facile du ce n’est pas moi, c’est l’autre. L’autre aujourd’hui c’est vous. Ce n’est pas par hasard que l’absentéisme est plus important dans des zones difficiles où de plus on met les enseignants débutants. Beaucoup ne sont pas de taille à affronter de telles difficultés avec aussi peu d’expérience. L’absentéisme y est de 20% et de 5% dans les Pyrénées-Orientales. Ceci devrait avoir été pris en compte dans la répartition des moyens, c’est-à-dire le quota d’heures supplémentaires mis à disposition de chaque principal et la répartition des remplaçants sur le territoire. Il ne devrait pas y avoir plus de protestations en Seine-Saint-Denis que dans les PO, si vous vous en étiez occupé. 

Le résultat est une manifestation qui ne va probablement que provoquer un petit coup de pouce circonstancielle sur cette région, sans qu’une solution pérenne soit mise en œuvre. En Seine Saint-Denis, les parents d'élèves organisent aujourd’hui des blocages dans 200 établissements scolaires pour protester contre le manque de remplaçants. Les points chauds devraient se concentrer dans une vingtaine de communes du département. L'action doit être symbolique, les parents doivent bloquer l'accès aux écoles primaires et aux collèges pendant quelques minutes avant de laisser entrer les enseignants et les élèves. Les représentants des parents doivent rencontrer la ministre de l'Éducation nationale ce mercredi. Les syndicats des enseignants dénoncent une "situation ubuesque" propre à la Seine-Saint-Denis. "On a connu la situation d'une enseignante de SVT non remplacée pendant deux mois dans un collège. À Paris, cela n'aurait pas duré plus de trois semaines", raconte une déléguée du syndicat Sud. Selon les calculs de la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE), le non-remplacement des enseignants représentent 20 000 jours d'absence cumulée à l'échelle de toute la France depuis le début de l'année scolaire. 

Si j’en crois les chiffres, on peut faire un calcul simple à la louche. Un enseignant peut couvrir 7 mois de l’année à 20 jours par mois soit  140 jours par an si l’on enlève les vacances. Il s’agit donc de recruter au moins 143 enseignants supplémentaires, disons 150 et pourquoi pas le double donc 300. Ceci donnerait 3 enseignants mobiles en moyenne par département en plus. Avec 60000 enseignants de plus où est le problème ? Ou alors les 60000 ne sont sans doute pas recrutés et l’administration en a probablement pris le plus grand nombre, sinon il n’y aurait pas de difficulté mais que des solutions. Au lieu de philosopher sur le « sexe des anges » ou des angelots qui vous sont confiés, Madame la Ministre vous feriez mieux de prendre votre calculette sur votre smartphone et vous intéresser aux problèmes de terrain.

Peut-être aussi devriez-vous vous intéresser à la rémunération de vos enseignants devant le constat que cette profession attire de moins en moins. La baisse des notes exigibles pour le recrutement des enseignants, en particulier dans certaines disciplines comme les mathématiques, ne peut permettre une meilleure qualité de l’enseignement. Je retrouve un témoignage d’une parente d’élève, racontant que son enfant en CM1 corrigeait les fautes d’orthographe au tableau commises par l’enseignante. Ceci s’est terminé par un abandon de poste de l’enseignante durement touchée dans son amour-propre. L’Enseignement en France ne cesse de se dégrader en qualité et l’abaissement des critères de sélection tant dans le corps enseignant que dans les élèves ne répond qu’à un critère de quantité. Le baccalauréat n’est qu’une formalité pour la plupart des élèves qui atteignent la terminale avec des bacs très disparates en valeur et l’on voit l’encombrement de nos universités faire dire au Ministre de l’Enseignement Supérieur qu’il faudrait relever les conditions d’admission. 

On marche sur la tête ou à cloche-pied, pris dans des idéologies égalitaristes, sociétales et multiculturalistes, qui oublient que la réalité s’impose toujours contre ce genre de dérives où l’on confond égalité des chances et égalité des résultats, morale et façonnage des esprits, laïcité et laxisme. Certes les temps ont changé et les élèves ne sont plus les mêmes devant les enseignants. Deux évènements majeurs y ont participé, mai 68 et l’immigration en partie non intégrée de plus en plus importante chez les jeunes. La relation d’autorité de l’enseignant envers ses élèves, mise en cause après 68, ne dépend plus essentiellement de l’autorité investie par le respect de la fonction mais par la qualité pédagogique de l’enseignant. La qualité de l’enseignant devient donc encore beaucoup plus importante, et ce d’autant plus que la classe est difficile. Par ailleurs la stabilité des programmes et des horaires ne dépasse pas deux ans. Tout est fait pour perturber des enseignants fragilisés, moins formés, et peu payés. 

On ne peut être exigeant envers les enseignants que dans deux cas, le sacerdoce que ressentait profondément les anciens enseignants, ou une rémunération attrayante. L’idée de dévouement existe encore mais elle cède de plus en plus au découragement et au sentiment de ne plus être reconnu comme une profession noble et respectée. Ce n’est pas par hasard qu’à Paris le taux d’absentéisme est deux fois plus élevé dans le public que dans le privé. Il y a certes une population d’élèves très différente, le critère de l’argent donnant des élèves mieux assistés dans le milieu familial, mais le privé a aussi le pouvoir de sélection des enseignants. Madame la Ministre ne semble pas préoccupée par les statistiques internationales où nous dégringolons régulièrement sur des matières de base comme la lecture et le calcul, la connaissance de la langue et les mathématiques. On n’est pas prêt de remonter la pente avec pourtant le budget le plus important de tous les Ministères où l’Éducation Nationale est le premier employeur de France. On aime savoir ce que deviennent les 47 milliards de l’Enseignement scolaire et les 25 milliards de la Recherche et de l’Enseignement supérieur quand la Justice émarge à 6,6 milliards, non ? Mais le constat est déprimant. 

L’effort budgétaire de la France ressemble beaucoup plus 

A un tonneau des Danaïdes et à un fourre-tout 

Qu’à une véritable volonté de qualité ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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