mercredi 20 août 2014

L’épouvantail agité de la sortie de l’euro est un enfumage !



Le bon peuple, dont nous faisons partie, est abreuvé de déclarations péremptoires sur le cataclysme que déclencherait une sortie de l’euro. Le sujet était même tabou et ne méritait que le dédain de ceux qui y voyaient un sujet important de discussion. C’était un peu « Passez, il n’y a rien à voir ! ». Les tenants d’une discussion de fond étaient traités de récalcitrants ignares en économie.

Seuls les dirigeants de haut vol, préparés dans la fonderie de l’ENA aux seules vertus du keynésianisme déformé, étaient, à gauche et à droite, en mesure de mener une politique européenne à monnaie unique pour le bien de la France. Sur ce point, il y avait un front républicain du Front de Gauche à l’UMP prêt à sortir de ses gonds à la moindre contestation de la vérité monétaire, du fleuron de la pensée unique ! L’écho médiatique ne manquait pas d’occulter les discussions à ce sujet ou amenait les opposants à un lynchage par des économistes choisis, à la solde de l’État et des puissances financières, comme les médias. 

Patatras ! La rentrée de septembre s’annonce difficile selon Manuel Valls, celui qui mène, au moins selon la Constitution, la politique du gouvernement. Au discret mais constant ralliement des économistes à la thèse de la nocivité de l’euro et aux doutes de politiques de gauche et de droite, viennent s’ajouter les performances désastreuses de la politique gouvernementale. Tous les voyants sont au rouge : croissance proche de la déflation, déficit budgétaire plus important que prévu, PIB/habitant en baisse, déficit chronique du commerce extérieur, pression fiscale en hausse, recul des investissements, chômage au plus haut… si un feu vert avec la croissance qui croit de 0,5%... grâce à la hausse des prix de l’énergie ! 

Le Pacte de Responsabilité, qui succède au Pacte de Compétitivité, sans que l’on sache vraiment ce qu’il contient, s’annonce plutôt un pacte avec le diable, un Medef insatiable qui avance des chiffres de création d’emploi fantaisistes et qui œuvre essentiellement pour les grandes entreprises. Les 50 milliards, dont déjà 10 dépensés, s’étalent sur une période suffisamment longue pour n’être que d’une efficacité limitée. Il va entraîner une pression à la baisse sur les rémunérations des salariés, ce qui va peser négativement sur la consommation. Les perspectives pour 2015 ne sont guère plus encourageantes malgré une croissance à prévoir de 0,8%. Mais, compte tenu des tendances actuelles à la dégradation de la situation internationale, l’année 2015 pourrait bien être aussi mauvaise que ne le sera déjà 2014. Nous devrions atteindre le cap des 4 millions de demandeurs d’emplois (pour la catégorie « A » seulement…). 

La France n’a pas d’avenir à proposer à ses compatriotes, la morosité fait fuir la confiance et le taux de suicide déjà historiquement élevé pourrait augmenter. Les dernières dispositions sorties du Conseil des Ministres d’aujourd’hui sont plutôt du niveau des gadgets que d’une véritable avancée vers une perspective de progrès atteignable. Le choix de l’euro apparaît donc de plus en plus mis en cause, alors que l’Europe et surtout la zone euro prend du retard dans la compétitivité et la croissance mondiales. Le freinage de l’Allemagne, qui a fini de ponctionner sur les états voisins appauvris, ne peut que relancer le débat. Le sujet est en passe de devenir incontournable d’autant plus qu’aucune démonstration valable n’a été avancée du cataclysme de la sortie de l’euro par les politiques. 

Du coup les européistes font ressortir les arguments pour un peuple économiquement débile avec un empressement fébrile. Alors quels sont ces arguments ? Le premier fut le prix de l’essence, argument pour benêt, qu’il est facile de démonter quand l’on sait que 75% du prix est représenté par les taxes et que le pétrole brut n’intervient que pour 5%. La sortie de l’euro accompagnée d’une dévaluation de la monnaie de 20% n’entraîne qu’une augmentation de 1% du prix de l’essence à la pompe. Cette variation est tout-à-fait de l’ordre des variations mensuelles du prix que nous constatons. 


Plus sérieux est l’augmentation des produits importés. Cependant l’essentiel de notre consommation quotidienne est nationale. D’autre part notre dévaluation entraînera soit une sortie de l’euro avec une dévaluation plus importante en Espagne, en Italie et en Belgique, pays auprès desquels nous importons beaucoup, soit nous nous reconcentrerons sur une production nationale dans l’agriculture par exemple. Avant que nous fabriquions les autres produits importés, il faut s’attendre à une hausse de quelques % du coût de la vie pour les 20% de dévaluation. Ils peuvent facilement être compensés par une hausse des salaires et des retraites. De plus la diminution attendue du chômage grâce à la substantielle amélioration de la compétitivité peut permettre de consacrer des ressources aux allocations sociales.

Le second argument, beaucoup plus effrayant, c’est l’augmentation de la dette, supposée de 20% selon la même hypothèse, et donc d’une augmentation brutale de 400 milliards d’euros de la dette publique. Par ignorance des pratiques judiciaires mondiales, cet argument revient en boucle et suffit à jeter aux orties l’idée de sortie de l’euro. On peut lire ainsi dans le Monde : « L’enjeu financier des quelque 2 000 milliards d’euros de dette tricolore est tel que la France aura du mal à passer en force en imposant ses conditions à 97 % de ses créanciers – sous peine d’être tenue responsable de faillites ou de faire fuir de futurs prêteurs. Il faudra à l’évidence en passer par un compromis. » 

Deux remarques d’abord s’imposent. Qui peut au nom de la justice nous rendre responsables des prises de risque des banques étrangères ? Si la sortie de l’euro rend la France plus solvable, les prêteurs ne fuiront pas bien au contraire. Mais cet argument tient d’autant moins que la question de la dette publique se fonde sur une jurisprudence constante, tant internationale que nationale, depuis les années vingt. La dette émise sur le sol français sera remboursée dans la monnaie de la France, quelle que soit cette monnaie ! Par ailleurs le tableau ci-contre montre que l’État ne sera touché que pour 3% de sa dette, soit une augmentation de la dette de 0,6% ou 12 Mds€, moins que le déficit annuel de la Sécurité Sociale. 

Le contrecoup sera plus dur pour le reste des dettes privées touchées pour 19% d’entre elles avec une augmentation de 3,8% de la dette mais cela est à comparer aux 20% de gain de compétitivité acquis immédiatement. Le seul risque c’est la fuite immédiate des capitaux dès l’annonce. L’État sait maîtriser ce genre de risque comme l’a prouvé Chypre en fermant les marchés boursiers et financiers pour quelques jours après une annonce faite le vendredi soir. Les capitaux seront bloqués… sauf pour les coupables du délit d’initiés ! 

Le gouvernement tourne toujours dans le même pot oscillant entre une politique de la demande puis de l’offre, cette dernière étant un peu chèvre et chou. Devant la perte de confiance du pays, la faiblesse des outils mis en place malgré les rodomontades du duo gouvernemental, l’état de délabrement de l’industrie française, et une situation internationale devenue très instable, il n’y a pas d’autre porte de sortie que celle de l’euro. C’est une condition nécessaire même si elle n’est pas suffisante. C’est une condition sine qua non ! 

Croissance en paquetée de compétitivité et de responsabilité

Chômage, fils adultérin de la désindustrialisation, 

C’est l’ « heure au » choix de sortie ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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