jeudi 15 mai 2014

De quoi être tout retourné !


Le retournement économique est là dit notre Président, justifiant  son optimisme de 1% de croissance prévue en 2014. L’INSEE vient de sérieusement doucher ses espoirs avec la croissance nulle du 1er trimestre 2014. La question est désormais : le retournement c’est pour qui ? Le Japon voit en effet un retour de croissance au 1er trimestre mais le Japon c’est loin me direz-vous. Mais l’Allemagne c’est proche non ? Elle a une croissance meilleure que prévu au 1T à 0,8%, au lieu de 0,4%, croissance qui repose exclusivement sur la demande intérieure, avec une hausse des dépenses publiques et de celles des ménages, ainsi qu’une progression notable des investissements. Et nous ? C’est exactement l’inverse ! 

Les dépenses des ménages diminuent de 0,5%, les investissements diminuent également de 0,5% et la croissance nulle est moins bonne que prévu ! L’Allemagne accélère car sa croissance était déjà de 0,4% en dernier trimestre 2013 pendant que nous on décélère à 0% de croissance. Pendant que l’Allemagne est sur un rythme de 2,5% de croissance annuelle, nous avons prévu 1% pour 2014 et tout laisse à penser que cet objectif ne sera pas atteint car cela suppose une croissance de 0,4% sur chacun des trois derniers trimestres. L’Allemagne a compensé une petite faiblesse dans les exportations par une demande intérieure plus vigoureuse tandis que nous n’avons ni la compétitivité pour augmenter nos exportations ni une progression du pouvoir d’achat pour augmenter les dépenses des ménages. 

La situation en 2014 s’annonce particulièrement difficile et on voit que le gouvernement se trouve dans l’obligation de lâcher du lest sur les bas salaires qui sont les plus nombreux et font d’ailleurs l’essentiel de sa clientèle électorale. On voit de plus en plus mal comment il va pouvoir réaliser ses 50 milliards d’économies et tenir l’objectif de 3% de déficit public par rapport au PIB en 2015. Relancer la demande intérieure par une diminution de la fiscalité sur une seule tranche de consommateurs au nom de la solidarité, n’aura pas d’effet immédiat sur la demande intérieure car toutes les autres tranches vont lourdement ressentir l’augmentation des impôts en 2014. 

Par ailleurs on n’a toujours pas d’indications sur le sérieux des mesures d’économies sur les dépenses publiques à part une nouvelle coupe sombre dans le budget Défense. Il y a fort à parier que la Commission Européenne va renâcler sur notre proposition de budget en juin comme elle l’a fait pressentir d’autant plus que nous allons présenter une croissance en berne par rapport à de nombreux pays européens dont le Royaume-Uni. Le maintien du versement de liquidités par les banques centrales  dont la BCE permet une légère relance économique mais la France passe encore à côté ! Ceci étant, la politique d’austérité à l’allemande marche en Allemagne, mais pas dans les pays en crise. L’Italie est en croissance négative. Le Portugal vient d’en faire le constat avec une baisse de croissance de 0,7% au 1T malgré une hausse de sa note pour bonne application de l’austérité !

Après avoir cassé la tirelire pour sortir de la crise de 2008-2009 et avoir aggravé notre dette de 600 Mds€, nous n’avons pas pris les bonnes mesures de relance de notre économie qui demandait des sacrifices à tous, donc des mesure qui nécessitent la confiance des électeurs pour permettre de les appliquer autoritairement. Pire le changement de Président et le reniement sans exclusive des actions du gouvernement précédent, non seulement nous a fait perdre deux ans précieux dans la compétition internationale mais a continué à augmenter la dette publique et à désindustrialiser notre pays. 

Tout cela a été masqué dans un enfumage de lois sociétales qui a détourné le pays des vrais enjeux et de la réalité de la dangerosité de notre situation économique. Les bonnes recettes seront donc plus difficiles à appliquer et plus dures alors que notre situation s’est aggravée. Mais le pire est notre perte de crédibilité de notre Président auprès des citoyens et auprès des agences de notation, perte qui influe gravement l’opinion des investisseurs. Cela peut entraîner une baisse de notre notation cet été et rendre le financement de notre dette beaucoup plus coûteux voire suicidaire. Des mesures d’austérité trop dures, prises à chaud sous la pression de Bruxelles, peuvent générer une révolution sociale que les partis extrêmes canaliseront, une nouvelle augmentation des primes de risques et des prêts à notre pays. 

C’est donc une très mauvaise nouvelle que vient de publier l’INSEE, nouvelle que l’on pouvait pressentir lorsque l’on voit se déliter notre tissu industriel et la pénalisation par l’impôt que subissent les particuliers et les entreprises. Elle s’inscrit dans une déception au niveau de la zone euro avec 0,2% de croissance au lieu de 0,4% attendu. Même si  le gouvernement Valls prend une meilleure voie, la France, deuxième puissance économique européenne, est malade. Elle doit être opérée d’urgence et sa convalescence sera longue. Espérons que son pronostic vital n’est pas engagé ! Le Président croit en sa bonne étoile, cette fée qui va faire retomber sur nous le fruit des efforts des autres, mais au niveau de la zone euro le retournement est vers le bas. Le Président est comme le Corse allongé sous un châtaigner et qui attend que le vent fasse tomber les châtaignes pendant que nous continuons à donner nos offrandes au dieu Euro qui protège ! 

Baser l’espoir d’une vie meilleure sur l’amélioration de celle des autres 

Ne laisse que peu d’espoirs de le voir se réaliser 

Et la certitude de beaucoup de regrets 

De garder la monnaie unique !

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon