mercredi 27 novembre 2013

Centrafrique, centre d’ingérence


Nous voilà sur le départ pour une intervention en Centrafrique, on nous ressert pour se faire la mission humanitaire. Cela marche toujours comme en Libye où le massacre de Benghazi était imminent, comme en Syrie où le tyran était coupable des pires exactions contre son peuple. Quelle âme sensible peut nier qu’apporter son soutien humanitaire est un devoir de tout citoyen civilisé ? Comme pour les interventions précédentes, les partis de gouvernement donnent leur feu vert. L’ingérence, sous couvert de l’ONU ou sans lui, est devenue un acte ordinaire.

Pendant que nous réduisons nos crédits de défense, nous nous engageons plus profondément dans des croisades dites humanitaires dont le résultat n’est pas pour l’instant concluant en Libye, en Syrie et au Mali. Nous devions régler rapidement le conflit malien et nos troupes ont fait une avancée spectaculaire jusqu’au nord du Mali. Tout stratège militaire sait que dans certains cas, la retraite est la meilleure solution sur tous les terrains où son potentiel d’opposition est notoirement insuffisant. Il faut sauver les combattants, même en laissant le matériel que l’on peut toujours réapprovisionner. C’est ce qui s’est passé devant les troupes françaises. La conquête des villes n’assure en rien le maintien de la paix dans ce pays. 

Au Mali, les Touaregs se sont islamisés et ont quitté la Libye, où Kadhafi les avaient enrôlés, avec des armes sophistiquées, missiles, batteries anti-aériennes et ont fait cause commune avec les arabes djihadistes poussés par l’Arabie Saoudite. Les Touaregs veulent leur indépendance et il y a un racisme historique entre leurs peaux claires et les noirs du sud. C’est désormais le Touareg Iyad ag-Ghaly, le chef d’Ansar Dine, qui coordonne la résistance rebelle, Aqmi compris. La véritable guerre du Mali va commencer. Nos troupes y sont pour longtemps et finiront par lâcher prise comme en Afghanistan car une grande partie du Nord Mali est incontrôlable de par sa géographie physique et la connaissance du terrain qu’en ont les arabes et surtout les Touaregs. 

La République démocratique du Congo, ou Congo-Kinshasa à ne pas confondre avec la République du Congo ou Congo-Brazzaville, est le pays africain, grand comme quatre fois la France et ayant la plus grande superficie après l’Algérie mais c’est aussi un pays où l’insécurité et la misère règne provoquant massacres et maladies dues à la mal nutrition. Les femmes y sont particulièrement maltraitées et beaucoup d’organisations humanitaires s’en inquiètent. Le Rwanda voisin soutient une rébellion et s’est ingéré militairement dans le pays. Les forces onusiennes présentes sont loin d’avoir rétabli la sécurité et la France n’y apporte aucune aide militaire. 

On peut se demander si l’intervention en Centrafrique, pays voisin du Congo Kinshasa, est vraiment à but humanitaire ou s’il s’agit de prendre plus ou moins le contrôle de ce pays avec l’idée de combattre les forces djihadistes qui ont reflué du Mali. Notre intervention en appui des forces africaines va naturellement nous mettre en position de leader, quoiqu’en dise Laurent Fabius. Ce pays a vu la prise de pouvoir par le SELEKA en décembre 2012 avec l’appui d’éléments militaires venus du Tchad et du Soudan,  la dépose du président François Bozize et son remplacement par Djotodia. Contrairement à ce qu’affirme le gouvernement ce pays n’est pas sans une direction gouvernementale. 

Notre intervention n’est pas sollicitée par la direction actuelle, il s’agit donc d’une ingérence dans un pays, même si c’est sous le couvert de l’ONU. Evidemment la situation de chaos est évidente avec des exactions sur les populations, viols, massacres, et avec une rivalité religieuse entre chrétiens et musulmans. Des bandes armées incontrôlées sèment la violence dans le pays avec des interventions étrangères du Tchad et du Soudan qui s’octroient des légitimités dans les préfectures du pays. 

Ceci étant on voit mal ce que peuvent faire les forces d’intervention en dehors des villes. La solution ne peut être que politique mais ses chances de réussite semblent bien minces sous la poussée islamiste qui ne lâchera pas plus prise qu’au Mali. Nous devrons rester aussi longtemps dans ce pays. Tchad, Côte d’Ivoire, Mali, Centrafrique voient la présence permanente de forces françaises et nous imposons comme les gendarmes de l’Afrique sans y être soutenus par l’UE. Nous nous présentons comme l’armée européenne sans en avoir reçu l’adoubement par les pays européens. En fait nous n’avons besoin que de l’accord des Etats-Unis qui nous sera donné via l’ONU. 

La maintenance des matériels nécessaires aux armées devient de plus en plus difficile car beaucoup sont à bout de souffle. Le personnel et les crédits se raréfient. Il y a un vent d’incohérence dans la politique française qui ne peut maintenir sa grandeur que par des croisades à fort risque d’échec. L’Allemagne nous regarde et travaille dans la rigueur budgétaire et la compétitivité. La vassalisation aux Etats-Unis, l’appétence à la guerre ne grandissent pas la France mais la détourne de ses objectifs, l’indépendance de notre patrie et sa réussite économique et sociale.
 
La guerre n’a d’intérêt que lorsqu’elle a vaincu. 

Celui qui la déclenche n’est jamais le peuple 

Mais celui qui prétend qu’il en tirera profit ! 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF Languedoc-Roussillon

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