samedi 5 octobre 2013

L’école à l’épreuve de la qualité

Le Ministère de l’Education Nationale est un ministère empoisonné et nombreux sont ceux qui s’y sont cassé les dents. Le résultat est que les réformes succèdent aux réformes à un rythme que les populations concernées, enfants, parents, enseignants et administration ne suivent que difficilement. Souvenez-vous de la querelle sur les méthodes d’apprentissage de la lecture. La brutalité de l’application de la méthode globale n’a pas permis aux enseignants d’en tirer des évolutions positives et il a fallu de nombreuses années pour qu’une synthèse soit faite entre nouvelle méthode globale et ancienne méthode syllabique. C’est à partir de là que l’orthographe est entré dans une période de dégénérescence. A tel point que peu nombreux seraient les élèves qui pourraient être admis en sixième si les 5 fautes valaient la note zéro, note éliminatoire autrefois lorsqu’un filtrage existait encore pour entrer dans le secondaire.

Mais au collège se sont abattus les cours d’anglais privilégiant l’oral par rapport à l’écrit à un point tel que la grammaire, l’écriture et la lecture de cette langue n’étaient plus acquises. C’était pourtant l’anglais écrit qui était le plus utile dans la plupart des professions ayant besoin au moins de lire cette langue. Puis sont arrivés les maths modernes avec une impréparation, voire une découverte, des enseignants. Elles ont envahi tout l’enseignement depuis les petites classes en ajoutant des abstractions que les enfants ne comprenaient pas avant que tout cela arrive à maturité et soit une avancée. 

N’oublions pas l’introduction de l’informatique qui a inondé les classes d’ordinateurs devant lesquels les enseignants restaient sans voix, incapables d’enseigner ce que la plupart n’avaient jamais approché eux-mêmes. A tout cela s’est ajouté des incessants changements de programmes dans les différentes matières, le collège unique, les allers retours sur le temps scolaire, les vacances et les rythmes scolaires. Il s’en est suivi un gâchis d’argent, une baisse de la performance de l’enseignement et une démotivation d’un corps enseignant mal rémunéré alors que l’évolution de la société rendait le métier de plus en plus difficile. 

La vocation pour le plus beau métier du monde s’est étiolée et la compensation au recrutement s’est faite par une admission au CAPES avec des notes largement au-dessous de la moyenne. Pour les élèves la notation de leurs travaux est devenue l’objet de surévaluations en cours et dans les examens. La réalisation de quotas (80% de bacheliers) et la quasi suppression des redoublements a fortement diminué la valeur du succès aux examens. A titre indicatif le nombre de mentions « Très bien » a crû dans une proportion qui ne peut être due à l’évolution de l’enseignement ou à la qualité des jeunes de cette génération. Cela se poursuit dans les universités où la première année est trop chargée d’étudiants et où il faut les admettre plus facilement en seconde année. Il est évident que le processus continuera sur les années suivantes. La quantité prime désormais sur la qualité. 

L’allongement du temps passé dans la formation avant l’entrée dans la vie adulte n’a permis d’augmenter que le coût de l’Enseignement. Malheureusement la comparaison avec les autres pays montrent un recul des performances de notre enseignement. Dans le classement mondial la France est 12ème pour le coût par élève de son enseignement, mais 22ème en mathématiques et en lecture en fin de scolarité obligatoire et à la 27ème place en sciences. Un pays comme la Finlande a un enseignement moins coûteux et des résultats meilleurs. Cette baisse de performances éducatives à des conséquences collectives, la baisse de compétitivité du pays, et individuelles, avec le grand nombre d'élèves qui quittent l'école sans diplôme ni qualification (12,8% des 18-24 ans en 2011). Ceux-ci auront du mal à trouver un emploi, avec le maintien d'un taux d'illettrisme inquiétant, également. 

Vincent Peillon lance une nouvelle réforme. Je ne critiquerai pas à priori l’idée de mieux répartir le temps scolaire et de raccourcir les vacances d’été, même si ce dernier point est un serpent de mer et est déjà repoussé à 2015… au moins. Non ce qui est consternant c’est une nouvelle impréparation matérielle et psychologique de cette réforme. De plus on a le sentiment que l’Etat décide de tout sans concertation suffisante. Les maires sont invités à s’exécuter non seulement sur l’organisation du temps périscolaire mais aussi sur le plan financier sans d’ailleurs tenir compte des difficultés très différentes pour les petites et les grandes communes. Le bricolage et la précipitation d’un nouveau ministre à marquer son passage ne laissent pas augurer d’une véritable évolution de la qualité de l’enseignement mais d’une augmentation du coût global que nous paierons finalement par les impôts locaux et d’État. 

Redonnons ses lettres de noblesse et l’autorité au métier d’enseignant. Leurs émoluments en font partie car la France de demain se doit d’avoir une école qui aura non seulement éduqué et formé ses jeunes à la pratique d’un métier mais les aura guidés vers ceux que réclameront notre pays. L’élève d’aujourd’hui doit savoir que son bien-être futur dépendra de sa facilité d’adaptation à un monde où la technologie et la science modifient la société à un rythme toujours croissant. C’est donc surtout des têtes bien faites, plutôt que bien pleines, dont le pays a besoin. Prenons le temps de repenser un enseignement de qualité et non de bricoler en permanence pour de piètres résultats. Ayons l'humilité de prendre des idées ailleurs et pensons qualité avant quantité.

Mais plutôt que d'enseignement (s'il est mal conçu, au moins il existe), 

C'est d'éducation que manque aujourd'hui la jeunesse. 

Hervé Bazin 

Claude Trouvé 
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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