dimanche 7 juillet 2013

La République face à ses principes fondateurs (2ème partie)


Notre président vient de faire un voyage éclair en Tunisie dont l’utilité nous échappe un peu sinon par intérêt commercial avec un pays autrefois colonisé et auprès duquel il faut continuer à regretter les méfaits du colonialisme. Peut-on être fier d’adouber un gouvernement accusé sur les réseaux sociaux de bloquer la transition démocratique dans le pays ? Alors que le parti islamiste tunisien Ennahdha (au pouvoir) réaffirme sa solidarité avec le président Mohammed Morsi et appelle le peuple égyptien à respecter la légitimité électorale ?
 
Etait-ce le moment de visiter ce pays ? Je ne le crois pas quand on a agi sur ce pays pour faire libérer quelques femmes aux seins nus venues défendre la liberté de la femme. Ces femmes encouraient des peines bien plus graves sans cela. Il n’est pas de mon propos de justifier leur action mais c’est un fait que la condition de la femme ne s’est pas améliorée depuis l’élection d’un gouvernement largement influencé par les Frères musulmans, en témoigne ce qui suit.

Nos jeunes femmes européennes avaient entrepris une action provocatrice pour soutenir une autre jeune fille, Amina, qui avait publié une photo d’elle seins nus sur internet. La phrase dont Amina accompagnait sa photo résume avec une parfaite lucidité la condition du corps féminin : mon corps m’appartient et il n’est l’honneur de personne. Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Dans les sociétés patriarcales (c’est-à-dire presque toutes, mais certaines le sont à des degrés insupportables), le corps de la femme ne lui appartient pas. C’est un objet symbolique, investi par l’honneur masculin. C’est-à-dire par la honte. Ce corps que les hommes désirent, ils en ont honte aussi, alors il leur faut le cacher, le voiler, l’enfermer, et s’il s’exhibe, le punir, l’enfouir, le supprimer parfois.

Amina est en prison, et bien peu ont le courage de la soutenir, comme si elle avait commis un crime honteux. Pas loin, les Européens bronzent tranquillement à Djerba ou font du shopping à Monastir. Notre président n’a pas saisi l’occasion du repentir du colonialisme pour évoquer la condition de la femme dans le pays du Maghreb où ses droits avaient le plus évolué avant le printemps tunisien. Le chantre de la parité homme-femme en France s’en est  abstenu dans un discours « brosse à reluire » lénifiant.

Amina a encore de la chance. Elle n’a pas été lapidée, comme le demandait un sympathique prêcheur salafiste, car les hommes sont nettement moins miséricordieux qu’Allah. Elle n’a pas été pendue à une grue à seize ans pour le crime d’avoir flirté, comme en Iran. Elle n’a pas été enterrée jusqu’à la taille et lapidée pour le crime d’avoir été violée, donc pour avoir attenté à l’honneur des hommes, comme au Pakistan. Elle n’a pas été aspergée d’acide sulfurique pour le crime de n’avoir pas été assez voilée, comme au Cachemire. Elle n’a pas été abattue par ses frères pour le crime d’avoir aimé un homme dont ils ne voulaient pas, comme un peu partout. Elle n’a pas été supprimée dans le ventre de sa mère pour le crime d’être une fille, comme en Inde. Elle n’a pas été assassinée pour le crime d’avoir voulu éduquer des filles, comme en Afghanistan. On n’a pas applaudi celui qui l’a brûlé vive, comme on l’a fait à Vitry sur Seine pour l’assassin de la jeune Sohane.

L’occasion était belle pour notre Président de parler du sort de millions de femmes dans le monde qui aspirent à sortir d’une société patriarcale où leur corps ne leur appartient pas et dont la vocation première est utérine. Il est de bon ton de réclamer la parité homme-femme en France, au forceps par les quotas au fi de la qualité des femmes mises en responsabilité. Il est beaucoup plus facile d’oublier ses principes de libération de la femme lorsque l’on sait que cela ne va pas de soi dans un pays musulman.

De Gaulle avait sans peur crié au Canada « Vive le Québec libre », au risque de choquer toute l’Amérique du Nord et le Royaume-Uni. Hollande n’a pas crié en Tunisie « Vive la femme libre de son corps ». Notre Président transforme la société française en faisant fi des cris de la rue. Mais il n’a eu en Tunisie que ce que l’on appelle un langage diplomatique, voisin de celui de la langue de bois, et montré que les principes que l’on défend pour se faire élire ne méritent pas qu’on les porte haut et fort comme notre fierté d’être français. C’est évidemment beaucoup moins gay !

C’est pourquoi la démocratie recule dans notre pays

Le courage de la défendre quitte nos élites

Que le vote démocratique a transformé

En potentats !

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire