dimanche 12 mai 2013

Chypre ou le silencieux coma de l’euro

L’Union européenne vient de mettre au pas un petit pays, avant de redécouvrir le contrôle des capitaux puis d’assumer l’existence de deux euros. Est-ce le coma dont ne sortira l’euro que pour mourir ? C’est en tous cas, une double entorse aux principes fondateurs de l’UE. Le contrôle des capitaux est exactement le contraire de la libre circulation des capitaux. En imposant un blocage des capitaux à Chypre, même provisoire, l’UE se contredit mais aussi crée deux euros, le chypriote et l’autre hors de Chypre.

Mais l’intervention sur Chypre a aussi mis en lumière la possibilité d’inclure les déposants des banques dans la restructuration de celles-ci ! Plus que d’une explosion de sa dette, Chypre a surtout été victime des incidences sur cet Etat de la restructuration imposée aux créanciers privés de la Grèce au cours du printemps 2012. Pour atténuer cet effet Chypre avait alors demandé 17,5 milliards d’euros alors que sa dette n’était que de 63% du PIB et que les actifs bancaires étaient deux fois moins importants qu’au Luxembourg, pays casino de l’UE. Cette demande est restée sans écho jusqu’au moment où Chypre fut au bord de la faillite.

Pour un prêt de 10 milliards plus 1 du FMI, la Troïka lui a  imposé alors des contraintes tellement drastiques que le Parlement chypriote les a rejetées à l’unanimité avec en particulier une taxe de 6,6% sur les dépôts bancaires inférieurs à 100.000 euros. C’était la goutte qui faisait déborder le vase. C’est alors que de son propre chef, la BCE a durci le ton avec un ultimatum de blocage du prêt forçant le gouvernement à accepter dans l’urgence mais avec la suppression de ce dépouillement des déposants modestes.

Néanmoins rien n’était changé sur le fond, la taxe sur les dépôts supérieurs à 100.000 euros était non seulement maintenue mais devait être augmentée pour compenser la taxe sur les montants inférieurs, la poussant de 9,9% à une valeur de l’ordre de 60%. La BCE venait de sortir de son rôle de contrôleur de l’inflation pour entrer dans celui de la politique, un nouvel accroc aux principes fondateurs de l’UE.

Ce petit pays, qui ne représente que 2% du PIB de la zone euro, a été mis à l’index alors que l’on a ignoré son appel d’aide au moment opportun pour lui imposer une tutelle avilissante mais surtout l’UE a violé ses principes fondateurs et démontré sans le vouloir que la mise en place de deux euros démontrait que l’on pouvait sortir facilement de la monnaie unique.

L’affaire est considérée comme réglée mais, au passage on a montré que l’aide aux pays en difficulté n’était plus prise totalement en charge par les autres pays, la solidarité vient d’en prendre un coup. Par contre le silence a été imposé à ce pays qui se débat dans une crise sociale et une pauvreté accrue. La France, par la voix de son Ministre des Finances, a jugé que c’était un bon traitement de cette affaire et que ce serait surtout les Britanniques, les Russes et des pays du Moyen-Orient qui paieraient la note, ce qui est une façon assez cavalière de dépouiller les autres. L’Allemagne a montré explicitement les limites de l’aide qu’elle peut consentir.

Il est illusoire de penser que l’Allemagne changera de politique. Sa démographie en perte de vitesse lui impose de se constituer des réserves pour payer les retraites futures. Les bravades du PS et de son gouvernement, pas plus que les « bonimentages » de Mélenchon, alors que le simple chiffrage de ses propositions montrerait qu’elles sont irréalisables, ne la feront pas changer d’avis.

 L’Allemagne a transféré sur les travailleurs les baisses des charges des entreprises au risque de créer de la pauvreté et de l’inégalité, mais elle engrange chaque année et son équilibre budgétaire retrouvé lui permet d’envisager de diminuer le poids du remboursement des intérêts de la dette. Surtout il lui assure de mieux résister à une envolée des taux d’emprunt et d’apparaitre comme un pays sûr pour les investisseurs.

Depuis 2000 la France voit sa balance commerciale se dégrader en % de PIB, on peut trouver que la date d’entrée dans l’euro est une simple coïncidence mais elle est troublante. De plus on voit que l’Italie suit le même chemin et que la dégradation est catastrophique pour l’Espagne et la Grèce alors que l’Allemagne progresse allègrement. Comment peut-on encore penser que nos mesures d’austérité-relance suffiront, à moins que l’on soit prêt à transférer le poids des charges sociales de l’employeur sur le salarié comme outre-Rhin.

Notre industrie étant en voie de disparition, cela risque d’être trop tard mais on a eu la démonstration avec Chypre qu’une sortie ordonnée de l’euro est possible et que la dévaluation intérieure de l’Allemagne peut être compensée par un rééquilibrage des monnaies nationales à condition… de remettre en cause les traités et sortir au moins de l’euro. 

L’euro est entré dans un sommeil comateux assisté

Pendant que notre PS croit toujours au Père Noël.

La croissance sous perfusion maintient en vie,

Elle ne guérit pas. L’extraction du mal

OUI !


Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon


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