jeudi 14 mars 2013

L’Europe… Pour quoi ? Pour qui ? (6ème partie)

En fin de compte le Traité de Lisbonne, Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne, s’est substitué au projet de Constitution, document unique, laissant vivre le Traité de Rome initial et la Charte des droits fondamentaux. On ne peut pas dire que, sur le plan juridique et de la simple compréhension, cela ait facilité les choses.
A ce stade de l’évolution des traités on perçoit facilement l’ombre des Etats-Unis qui pousse ce marché européen juteux, manipulable car politiquement et militairement faible, à la mondialisation. Devant eux, on retrouve les britanniques qui ne décident jamais rien de fondamental sans l’aval des Etats-Unis. On perçoit aussi le déni de démocratie qui tient les peuples européens le plus éloigné possible des grandes décisions, d’autant plus que les rares tentatives se sont soldées par des échecs, des remises au vote et même une fin de non-recevoir.
Sur ce dernier point l’élaboration et la signature de la Charte des Droits fondamentaux en est un exemple révélateur. Combien  de citoyens connaissent l’existence d’une telle charte ? Très peu et bien moins encore en connaissent la portée. Elle a pourtant été signée et proclamée par les présidents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission lors du Conseil européen de Nice le 7 décembre 2000. Cette charte a été élaborée par un groupe de travail qui s’est proclamé Convention après avoir été mandaté par les Conseils européens de 1999. Cette Convention était essentiellement constituée de juristes.
Du début de son élaboration à sa signature, cette charte, pilier juridique fondamental de l’UE, s’est imposée sans aucune intervention démocratique si ce n’est l’adoption parlementaire européenne. Il n’a fait l’objet d’aucun débat politique national et s’est mis en place dans un silence médiatique révélateur. Ce texte de 54 articles est pourtant loin d’être anodin pour le citoyen puisqu’il a trait aux droits de dignité, de liberté, d’égalité, de solidarité, de citoyenneté et de justice… excusez du peu !
Non explicitement contraignante dans le Traité de Lisbonne, elle sert désormais de plus en plus de référence au tribunal de première instance et la Cour de justice des communautés européennes. C’est ainsi que sur l’un des textes fondamentaux, non seulement les peuples en ont été délibérément écartés mais cette Charte est devenue jurisprudence contraignante dans son application et a la même force juridique que les traités. C’était d’ailleurs en elle-même un passage en force à sa naissance.
Que ce soit pour le grand élargissement des frontières de l’UE en 2004 ou pour l’ouverture de négociations d’adhésion avec la Turquie le 3 octobre 2005, pays d’une culture très éloignée de la nôtre et n’ayant qu’une infime partie de son territoire en Europe, la consultation du peuple n’est pas de mise. Le citoyen européen ignore ses représentants et sa citoyenneté nationale n’est plus sollicitée pour l’engagement de son pays dans les affaires européennes. Celui-ci d’ailleurs voit ses attributions régaliennes de plus en plus réduites, particulièrement dans le domaine monétaire et socio-économique. Il fait donc l’objet d’une surveillance étroite qui peut d’ailleurs l’amener cette année à être condamné à des sommes pouvant atteindre 9 milliards d’euros pour non-respect des directives européennes.
En même temps que l’étau se resserre sur l’Etat-nation, en le dépouillant de sa souveraineté, l’Europe patchwork se désagrège avec un chacun pour soi à relents nationalistes devant l’échec d’une hydre qui ne sait plus où sont ses frontières, d’une monnaie unique destructrice des Etats faibles et d’une aspiration transatlantique à laquelle, militairement et politiquement, elle ne peut résister et qui sucera ses forces économiques dans une guerre sans merci.
Le citoyen européen est déjà mort avant d’avoir vécu,
L’Europe est façonnée par la main américaine,
La démocratie réduite à un opium du peuple.
Claude Trouvé
Coordonnateur MPF Languedoc-Roussillon