samedi 9 février 2013

Le Mali, une affaire difficile à terminer

La guerre que mène la France au Mali est dans la continuité de celle qu'elle a menée en Libye, de celle qu'elle mène discrètement en Syrie et de celles qu'elle prépare, principalement dans les espaces de jeux de guerres faciles, en Afrique et dans le monde arabe. Cette œuvre de « paix » est menée sans les Casques Bleus des Nations-Unies. Elle s’octroie le droit d’une géopolitique habituellement préemptée par ces grandes puissances officielles que sont les États-Unis, la Russie, la Chine. C’est sans l’aval explicite de l’ONU pour guerroyer au Mali, sous le simple couvert d’une lettre de demande d’aide du Président malien, que nous avons mené une opération militaire éclair.

Il n'est pas fait grand état des accords d'aide passés antérieurement avec ce pays. Nos partenaires du Conseil de Sécurité ferment les yeux sur cette intervention pour des raisons diverses. La Russie et la Chine se contentent de voir que les Etats-Unis n'ont pas choisi ce prétexte de lutte conte le terrorisme pour débarquer en Afrique où ils sont en train de s'implanter sur le plan économique. les Etats-Unis doivent gérer une opinion peu encline à ouvrir un nouveau front sur le terrain. Comme en Libye et en Syrie, ils préfèrent que la guerre soit menée par leurs alliés.

C’est donc seule, ou quasiment, que la France s’est lancée et attend l’aval des Nations-Unies pour justifier l’arrivée des armées africaines, alors qu’elles sont déjà en partie sur place. On peut même dire que c’est en contradiction avec les votes du Conseil de sécurité qui n’a jamais béni des actions militaires de terrain. On est en plein flou du droit d’ingérence mais la victoire, même sans combat, a suffit à faire taire les uns et les autres sauf dans les pays arabes à l’exclusion de l’Algérie pour l’instant. Inutile d’insister sur le peu de cas fait de nos partenaires européens qui nous le rendent bien en apportant chichement leur aide.

On est aussi dans le flou des déclarations du gouvernement qui a préparé son coup tout en affirmant que cela regardait les affaires intérieures du Mali. Le 11 octobre 2012, le président Hollande déclarait : « Nous ne pouvons pas intervenir à la place des Africains ». Le 24 décembre 2012, Le Drian, ministre de la Défense, disait : « C’est aux Africains d’intervenir, pas aux Français ». Deux semaines après, nous intervenions à une vitesse que seule une préparation de longue date peut permettre… mensonges donc !

Nous voilà donc engagés dans la profondeur de ce pays en quête de villes, dignes de ce nom, à délivrer. Le nombre d’ennemis mis hors de combat n’a fait l’objet que d’une déclaration de Le Drian sur une centaine de morts mais aucune autre information ni aucune image ne sont  venues donner foi à cette déclaration. En fait l’ennemi a refusé le combat, sachant très bien que lorsque l’on tient les villes on n’en a pas, pour autant, gagné la guerre comme ce fut le cas en Afghanistan.

Au nord nous pénétrons sur une terre islamique, ou considérée comme telle par l’islam. Cette incursion rentre dans l’utilisation du Djihad défensif qui permet, sans autorisation d’un calife, de combattre l’occupant impie par tous les moyens et le terrorisme en fait partie. Nous avons exacerbé la haine de l’Occident et les conséquences se feront sentir dans les mois qui viennent. Si nous avions apporté notre aide beaucoup plus tôt en barrière défensive sur la partie non envahie par le MNLA, nous aurions mené une mission de dissuasion à la progression, le temps que l’armée malienne soit digne de ce nom. Mais surtout nous n’étions pas en position d’agresseur.

L’arrivée d’armées africaines étrangères, sans Casques Bleus, ne peut que créer des tensions dans les civils et les militaires maliens. L’immensité du territoire, le repli des combattants adverses dans les déserts caillouteux et les petites bourgades, la faiblesse de l’armée et de l’Etat corrompu malien, la guerre ancestrale entre les noirs et les bédouins, ne sont pas près de nous permettre de partir dans un pays apaisé. Mais une grande question se pose :

Le devoir d'ingérence pour légitimer des guerres préventives

Sans l'aval explicite de l'ONU et de l'Europe

N'est-il pas un relent de néocolonialisme ?

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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