mardi 11 septembre 2012

Rembourser la dette a-t-il encore un sens pour nos gouvernants ?

Aucun signe de résolution de la crise ne se fait jour en ce moment. C’est aussi l’opinion de Joseph Stiglitz, prix Nobel d’économie 2001 et professeur à l’université de Columbia (New York City). Il affirme ce que j’ai écrit de nombreuses fois dans mes chroniques. L’origine de la crise est dans la « faillite du système économique et politique ».  Il ajoute : « Les forces du marché jouent un rôle mais elles sont le fait de décisions politiques ». La collusion d’intérêt entre les politiques et les banquiers tourne à une dépendance de plus en plus en forte des premiers vis-à-vis des seconds. « L’argent a une influence grandissante sur les processus politiques » ajoute-t-il.


Il en résulte que nous ne sortirons pas de l’impasse, dans laquelle nous sommes, avant des années et sans payer un lourd tribut. Stiglitz affirme : "Même les plus optimistes ne nous voient pas sortir de la crise et revenir au plein emploi avant 2018. Malheureusement et à moins de changer les politiques, il faudra donc des années avant que la crise ne se termine". On voit que notre Président, soit veut redonner confiance au peuple, soit le berner sur la réalité économique qui nous attend. C’est dans les deux cas exactement la même chose car je n’ose envisager la troisième hypothèse qui serait qu’il ne soit pas conscient que ses propos sont pas irréalistes. Ce n’est pas deux ans de galère qu’il nous propose mais beaucoup plus… à moins qu’enfin l’euro termine son agonie dans l’ordre ou le désordre.

Il suffit, pour se rendre compte, de faire un petit calcul de niveau élémentaire. Le PIB de la France était de 1996,4Mds€ en 2011. D’après le Président, la croissance serait proche de 0% pour 2012. Prenons le chiffre de 2000Mds pour le PIB de 2012. L’engagement de la France pour cette année est de 4,5% du PIB sur le déficit budgétaire soit 90Mds€. Nous en étions à 85 milliards en Juillet, le pari n’est donc pas encore tenu malgré le vote de 7,4 milliards de rentrées fiscales en plus en juillet. Pour 2013, l’engagement sur le déficit budgétaire est de 3% du PIB soit 60Mds€. Au passage on retrouve les 30 milliards supplémentaires à trouver en 2013.

Il faut en attendant diminuer notre déficit de 30Mds€ en 2013 et l’équilibre budgétaire en 2016 demande de trouver encore 3% du PIB soit 54Mds€ supplémentaires. Le passage de 2012 à fin 2015 pour atteindre l’équilibre budgétaire demande de trouver 84Mds€ au total si la croissance ne revient pas. Les dépenses publiques de 366Mds€ de 2012 doivent donc passer à 282 milliards, en diminution de 23%. Si les dépenses de l’Education Nationale, de la Sécurité et de la Justice sont intouchables, comme l’affiche le gouvernement, cela représente un total de 112 milliards auquel il faut ajouter 50 milliards de remboursement de la dette. Le total se monte à 162Mds€ soit plus de 44% des dépenses qui sont figées.

Si les 84Mds€ à gagner sont encore répartis en 1/3 de réduction des dépenses publiques soit 28Mds€,  la pression sur les autres postes budgétaires de l’Etat sera de 28/(366-162) soit une diminution de 13,7%, ce qui n’a jamais été réalisé. Ceci sous-entend que la pression fiscale doit augmenter aussi les recettes de 56Mds€ sur les 276 milliards prévus pour 2012 soit plus de 20% d’augmentation faisant passer la pression fiscale de 56% à près de 69%. A ce niveau il est certain que la consommation intérieure chute fortement. Elle entraîne le chômage et la fonte des recettes fiscales sur les sociétés. On est dans un cercle infernal et le but ne peut être atteint.

La croissance peut-elle nous sauver ? Si l’on fait l’hypothèse de 0,8% de croissance sur les trois ans de 2013 à 2015, on va trouver un surplus cumulé sur le PIB de 2,42% soit 48,4 milliards. En comptant sur un retour des recettes fiscales de (266 de recettes/2000 de PIB) soit 13,3%, on aurait (48,4*0,133)= 6,4 milliards de recettes en plus. On est loin des 84 milliards et il est illusoire de penser à des croissances de 4% dans les années à venir, qui n’apporteraient de toute façon qu’une trentaine de milliards supplémentaires.

Il est donc illusoire de sortir du cercle infernal par la politique d’austérité génératrice d’un recul de la croissance, déjà envisagée faible sans cela. Par ailleurs nous dépassons déjà les 1800Mds€ de dettes. Prenons ce chiffre, qui sera sûrement dépassé, pour la dette à fin 2012 et regardons si le remboursement de la dette sur une génération est possible. De 2013 à 2015 la dette s'est aggravée de successivement de 3,2,1%, au total de 6% du PIB soit 108Mds.Cela porte la dette à 1908 milliards en 2015. Sur 20 ans, en supposant que le taux d’emprunt soit de 2%, ce qui est déjà inférieur au taux actuel, il faudrait que l’État rembourse chaque année l’équivalent de (1908/20+1908*0,02) soit 134Mds€ par an pour éponger la dette, une fois l’équilibre budgétaire retrouvé… mission impossible.

Il est clair que nous serions déclarés en faillite si l’Etat était une entreprise privée ou à la rue et fiché à la Banque de France pour un particulier. Nos gouvernants font donc appel à la planche à billets de la BCE et, pour sauver les meubles, essaient de faire mieux que le voisin en espérant pouvoir encore emprunter à moindre frais si les agences de notation veulent bien ne pas décourager les acheteurs d’obligations souveraines. Ils ont délibérément abandonné toute idée de remboursement de la dette et comptent sur les générations suivantes ou une faillite mondiale généralisée ! En attendant ils nous font croire au miroir aux alouettes et vident nos poches pour remplir les leurs et celles des banquiers.

Si on continue dans la dette, on finira dans la dèche !

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon

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