dimanche 29 juillet 2012

La mort ou le départ de Bachar Al-Assad établiraient-ils un régime démocratique en Syrie ?

En effet c’est la question de fond pour l’esprit français nourri d’une propagande bien orchestrée sur les Droits de l’Homme. Y répondre par la négative remet en question l’intérêt de notre engagement au côté des Etats-Unis. Il ouvre la porte à des motivations toutes autres.

Par qui serait-il remplacé sinon par le Conseil National Syrien (le CNS), dominé par les Frères musulmans mais dans lequel les différents courants de l'opposition n'arrivent pas à s'unir. A ce propos dans une conférence récente, Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité de la DGSE et reconnu bien au-delà de l'Hexagone pour son expertise du monde arabo-musulman déclare :

"Tout comme son père, Bashar el-Assad n’est que la partie visible d’un iceberg communautaire complexe et son éventuel départ ne changerait strictement rien à la réalité des rapports de pouvoir et de force dans le pays. Il y a derrière lui 2 millions d’Alaouites encore plus résolus que lui à se battre pour leur survie et plusieurs millions de minoritaires qui ont tout à perdre d’une mainmise islamiste sur le pouvoir.
 
Les Alaouites sont une communauté sociale et religieuse persécutée depuis plus de mille ans. Issus au 10ème siècle aux frontières de l’empire arabe et de l’empire byzantin d’une lointaine scission du chiisme, ils pratiquent une sorte de syncrétisme mystique compliqué entre des éléments du chiisme, des éléments de panthéisme hellénistique, de mazdéisme persan et de christianisme byzantin.

[…]Les Alaouites sont considérés par l’Islam sunnite comme les pires des apostats. Cela leur a valu au 14 ème siècle une fatwa du jurisconsulte salafiste Ibn Taymiyya, l’ancêtre du wahhabisme actuel, prescrivant leur persécution systématique et leur génocide. Pourchassés et persécutés, les Alaouites ont dû se réfugier dans les montagnes côtières arides entre le Liban et l’actuelle Turquie. […] Après s’être libérés des occupations étrangères, les bourgeois musulmans sunnites de Syrie sont parvenus à l’indépendance de leur pays en 1943. Ils ont laissé l’encadrement de l’armée de leur tout jeune pays aux pauvres, c’est à dire les minorités : Chrétiens, Ismaéliens, Druzes, Chiites et surtout Alaouites. 

 […] Dans les années 70, Hafez el-Assad, issu d’une des plus modestes familles de la communauté alaouite, devenu chef de l’armée de l’air puis ministre de la défense, s’est emparé du pouvoir par la force pour assurer la revanche et la protection de la minorité à laquelle sa famille appartient et des minorités alliées – Chrétiens et Druzes - qui l’ont assisté dans sa marche au pouvoir. »

La Syrie est en proie à une guerre civile de type religieux dans laquelle l’armée dans son ensemble montre son loyalisme hormis certaines défections montées en épingle comme celle du général Manaf Tlass, un sunnite. L’insurrection est loin d’être générale, les minorités en particulier, nombreuses en Syrie, craignent l’arrivée au pouvoir des islamistes alors que les différentes communautés en particulier musulmane et chrétienne vivaient jusqu’alors en bonne intelligence.

Alain Chouet ajoute : « L’information diffusée en Occident n’est absolument pas crédible. La source de référence est l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), en fait un rédacteur syrien exilé à Londres et une traductrice. " Financé par les médias arabes c’est lui qui donne le nombre de morts et la liste des massacres…

Dans l’Armée Syrienne Libre qui compterait 40.000 combattants on trouve de nombreux étrangers, des Libyens, des Libanais, des Qatari, des Saoudiens et même des Afghans, des Turcs et des Français. Nombreux sont les salafistes, les djihadistes et les membres d’Al Quaïda. Ils ont vu leurs moyens renforcés par des fournitures d’armes venues du Qatar, d’Arabie Saoudite via le Liban et la Turquie.

Qu’en est-il sur le terrain ? Le « volcan de Damas » promis par les américains s’est effondré sur lui-même sous la répression des troupes loyalistes guidées par la majorité de la population. Le bilan, selon Thierry Meyssan journaliste indépendant, serait de 4.000 morts dans l’ALS et 3.700 d’entre eux faits prisonniers. L’attentat, fomenté par les américains avec l’Arabie Saoudite, a décapité l’armée syrienne sans la désintégrer. Damas est un échec. Alep ne devrait pas résister longtemps.

Nous assistons à une guerre civile religieuse où le pouvoir lutte contre des insurgés comme nous l’avons fait en Algérie. De toute évidence le pays serait depuis longtemps rentré dans l’ordre si des puissances étrangères, certains pour des motifs religieux et d’autres de suprématie économique, n’entretenaient pas ce conflit jusqu’à la mort du pouvoir reconnu jusqu’alors.

Le communiqué d’un groupe intitulé Ansar al-Cham est sans ambiguïté sur l’intervention arabe étrangère : "Le monde doit savoir que la Syrie a commencé à attirer des jeunes arabes prêts à rejoindre les révolutionnaires et les combattants. Ils ont le droit de frapper à travers le monde ceux qui soutiennent directement ou indirectement le gang au pouvoir en Syrie".

Est-ce vraiment notre combat ? Le faisons-nous pour donner le pouvoir aux Frères Musulmans comme en Libye ? Pour que le chaos s’installe comme en Irak ? Que vient faire la démocratie dans cette guerre qui n’en a cure ? Les Etats-Unis, mis en échec, montent encore un chantage aux armes chimiques alors que la Syrie a exclu de l’utiliser tant qu’il ne s’agit pas d’une agression extérieure caractérisée. Enfourcherons-nous encore ce bobard pour donner notre voix aux américains dans une réunion du Conseil de Sécurité de l’ONU ?

Dans une période où les pauvres et la classe moyenne

Vont devoir payer les erreurs de leurs gouvernants

La France se grandirait plutôt en payant ses dettes.

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon