vendredi 15 juin 2012

Une Europe à deux ou trois vitesses se prépare

Ce matin, vendredi 15 juin 2012, Mme Merkel a conclu dans un discours que le futur de l'Europe "se décide dans ces prochains mois, dans cette année"… "Il n'y aura pas de bonne union économique et monétaire sans union politique", synonyme d'abandon de souveraineté, a-t-elle par ailleurs affirmé, ajoutant: "je ne peux pas vouloir des euro-obligations et refuser tout contrôle" sur les budgets nationaux.

Ce discours était une réponse à celle de Jean-Marc Ayrault faite sur son intervention d’hier. Les choses sont claires du côté allemand. Elles le sont moins du côté français comme d’ailleurs depuis le début de la campagne présidentielle, l’essentiel est toujours caché et le flou est cultivé comme une marge de manœuvre. On retrouve la tactique mitterrandiste.

Avant de réellement discuter avec Angela Merkel notre président rencontre les dirigeants espagnols et italiens, entretiens à l’issue desquels il y aurait, selon lui, une grande convergence de vue. Ceci voudrait dire en clair que ces trois pays ne partagent pas du tout les vues de l’Allemagne même si leurs vues ne sont pas si identiques que cela. Par contre il devient évident que François Hollande veut créer un front antagoniste à la politique allemande.

Que cela soit avoué ou non par le gouvernement français il est clair que la survie de la zone euro ne tient désormais plus qu’à un fil et que l’idée d’une Europe du sud fait son chemin. La France se verrait sans doute bien en leader de celle-ci car elle est provisoirement encore la moins fragilisée et la plus importante puissance économique. Ce pari est néanmoins risqué et suppose la naissance d’un euro du sud plus ou moins indépendant d’un euro du nord sinon il y a tout à perdre dans l’union avec des pays incapables de faire face à leurs dettes.

Dans une partition de l’Europe, vaut-il mieux être le premier de l’Europe du sud ou le second de l’Europe du nord avec un axe franco-allemand encore protecteur malgré notre déficit commercial avec ce pays ? L’Europe du sud est jouable, tout dépend des conditions dans lesquelles elle se construit mais cela entraîne une dislocation de l’Europe et de l’euro dont les conséquences sont difficilement cernables. Le Royaume-Uni jouera sa propre partition et on ne voit plus son intérêt à rester seul grand pays dans une UE hors zone euro et éclatée. Essaiera-t-il un rapprochement avec l’Allemagne ou recréera-t-il une union marchande avec certains pays d’Europe comme il l’a fait dans le passé ?

C’est une partie de poker menteur qui se joue actuellement où chacun cache ses cartes et ses véritables intentions. Il apparaît probable que l’Allemagne est presque acquise à sa propre sortie de l’euro, donc à la mort de celui-ci. Elle a fait ses comptes et sait que déjà sa sortie serait moins lourde financièrement que son maintien. De grands patrons allemands se disent prêts à assumer le retour au mark. L’Allemagne, en tous cas, vendra chèrement ses apports financiers dans les prochaines discussions à venir.

L’avenir de l’UE et de la zone euro va se dessiner dans les semaines qui viennent et un éclatement devient une probabilité de plus en plus grande. L’Europe à deux ou trois ensembles est désormais dans les têtes même si les paroles officielles refusent d’y faire allusion. Les peuples n’ont pas le droit de savoir car ce qu’on devrait leur dire serait un véritable coup de massue et il est important de pouvoir décider avec un minimum d’appel à la démocratie… comme cela se passe en France et à Bruxelles.

Pour l’heure les projecteurs se rallument sur l’Espagne dont on concocte un plan de 50 à 100 milliards pour sauver ses banques mais il se dit que "le risque derrière, c'est que si ce plan ne permet pas de faire baisser la prime de risque et que le financement de l'Etat espagnol continue à des taux de 6,5-7%, ce n'est pas tenable, forcément à un moment il faudra mettre en place autre chose pour l'Espagne". Les projecteurs sont sur la Grèce et s’allument sur l’Italie… le trésor allemand n’est pas inépuisable...

Alors qui paiera pour eux ?
Nous !

Et pour nous à suivre ?
Encore nous ! Bon week-end !

… le dernier bon !

Claude Trouvé
Coordonnateur MPF du Languedoc-Roussillon