jeudi 1 mars 2012

Coût de la main-d’œuvre, recette de la croissance ?

La croissance est au cœur des préoccupations des chefs d’Etat européens réunis pour signer le pacte budgétaire. Elle est évoquée par les candidats à l’élection présidentielle comme le complément de la rigueur. Chacun y va de sa recette depuis le « made in France » jusqu’aux allègements des charges des entreprises. Le coût de la main-d’œuvre est cité comme un frein à la croissance mais que doit-on en penser ? Est-ce si évident ?

A première vue le cas du Royaume-Uni et de l’Allemagne ne milite pas en faveur de cette thèse car le premier, qui a le plus grand déficit du commerce extérieur,  a un coût salarial de 27% inférieur au second, qui lui a le plus grand excédent de son commerce extérieur. Pour y voir plus clair il convient de relier directement le coût de main-d’œuvre et la croissance de plusieurs grands pays de l’UE. Le graphique ci-joint (données Eurostat) montre que le lien est en effet moins qu’évident.

Il semblerait même que la croissance peut croître avec le coût de la M.O ! Peut-être peut-on penser que les pays qui ont une bonne croissance peuvent mieux payer leurs salariés. La hausse des coûts salariaux serait la conséquence de la croissance et non une raison de sa décroissance ! On pourrait même dire que dans l'UE une croissance nulle fait tendre le coût mensuel vers 2500 euros soit une baisse de 43% transmises  pour moitié sur les salaires !

Le cas de la Suède est significatif car le coût de main-d’œuvre, le plus élevé de l’échantillon de grands pays représentés, n’a pas empêché la Suède d’avoir la meilleure croissance. Pour le moins le lien n’a rien d’évident. En fait il faut savoir que le coût de la M.O n’est pas le seul coût qui va impacter le coût H.T du produit. Dans des usines très automatisées l’influence du coût de la M.O. peut être relativement faible par rapport au coût reporté de l’investissement.

Par contre il serait normal dans nos pays, devant produire de la haute technologie pour pouvoir trouver des marchés, que l’effort fait sur la Recherche et le Développement, ait un effet sur la croissance. Si ce n’est pas le cas, il faut admettre que la recherche se fait sur des secteurs n’ayant aucun débouché, ce qui admettrait que nos industriels sont de piètres managers. Regardons donc ce que traduit ce nouveau graphique ci-contre.

Il apparaît beaucoup plus clair et le lien est visuellement évident. Les pays à faibles croissances dépensent relativement peu en R&D par rapport à leur PIB et l’inverse est vrai. On voit toute la différence entre l’Italie et la Suède ! On voit que 1% de R&D générait 1,26% de croissance en 2010 et qu'en-dessous de 0,5% de R&D on tombait dans la récession. Même si la croissance est sensible à d'autres facteurs de l'économie mondiale, elle s'avère très liée à la recherche, la créativité et l'innovation.

Ce graphique est rassurant et montre la voie à choisir pour redresser notre pays. Les manipulations sur les coûts de M.O ou les allègements de charges des sociétés ne sont pas ou sont peu significatifs par rapport à la R&D. Les grands programmes d’investissement sur des chantiers technologiques où nos chercheurs créent des brevets est la seule alternative pour rayonner encore sur le marché mondial. Ce n’est pas par hasard que nous sommes bien placés dans l’astronautique, l’aviation civile, le nucléaire mais il y a bien d’autres secteurs moins prestigieux, mais tout aussi efficaces comme les produits de luxe, les logiciels, etc.,qui sont capables de faire briller le génie français. 

Plus notre enseignement formera une main-d’œuvre qualifiée

Plus nous mettrons en valeur nos cerveaux

Plus la croissance du PIB et celle des salaires seront au rendez-vous !

Claude Trouvé