mardi 8 novembre 2011

Une seule équation pour trois inconnues : dette, déficit, croissance

La Grèce a révélé aux dirigeants européens et à leurs concitoyens que la dette ne pouvait s’augmenter indéfiniment et que les emprunts avaient un coup d’autant plus élevé que le risque pris par les banques l’était aussi. Les banques ont même pris des risques parfois trop importants et vont le payer, ce qui n’est que justice. Les dettes des banques se sont transférées sur les Etats mais la dette globale a continué à augmenter dramatiquement car les Etats ont emprunté pour leurs plans de relance, lesquels n’ont fait que de différer la résolution du problème qui reste entier.

Désormais la crédibilité sur le remboursement de la dette par certains états, les PIIGS, s’est notablement affaiblie et, en ce qui concerne la Grèce, a presque disparu. Lors de ce dernier sommet de la zone euro et du G20 l’Allemagne a pris la direction économique de la zone euro. Les marchés devraient applaudir. Ils réclamaient depuis des mois une gouvernance économique européenne. Ils l'ont.

« L'Allemagne, à travers la main de fer d'Angela Merkel, a pris le leadership de l'Europe. Débarrassée de toute contrainte électorale jusqu'en septembre 2013, Angela Merkel a les mains libres. Et elle ne veut aucun compromis. Ce sera un plan de sauvetage allemand ou rien. Et toute l'Europe s'est inclinée. La dette grecque à 50%, la recapitalisation des banques, un Fonds de Stabilité raisonnablement augmenté, c'était son plan. Mais elle a ajouté des nouvelles exigences : une réforme des retraites en Italie, le départ de fait de Berlusconi au printemps 2012 et...l'obligation pour la France de venir avec un plan crédible de réduction du déficit budgétaire. Et elle a tout obtenu. »

La France se trouve devant une triple difficulté. Faute d’avoir anticipé, comme l’Allemagne et la Suède, l’assainissement de ses finances lorsque la croissance laissait des marges de manœuvre, elle doit résoudre ses difficultés avec une équation à trois inconnues donc avec une infinité de solutions toutes moins sûres les unes que les autres. Ces trois inconnues sont la dette publique, le déficit du commerce extérieur et le déficit de croissance. Il est dramatique de voir la gauche et la droite se relancer la responsabilité car ils sont réellement tous deux responsables.

L’accroissement de la dette ampute nos possibilités d’investissement en augmentant l’intérêt de la dette. Tout déficit sur le commerce extérieur pèse sur celle-ci. La croissance se nourrit des grands travaux d’investissement, de la consommation intérieure et de l’exportation de nos produits. La rigueur, la faiblesse des investissements publics, la baisse de notre compétitivité sur les marchés amputent donc notre croissance. C’est tout simplement la quadrature du cercle ! Dans le système monétaire de l’euro et l’actuelle globalisation des échanges le problème n’a que de mauvaises solutions.

Comme en mathématiques il faut ajouter deux autres équations, la flexibilité de la monnaie et le choix d’une politique économique et budgétaire adaptée à notre pays. La flexibilité de la monnaie joue sur notre compétitivité et la politique économique et budgétaire permet de doser entre la rigueur budgétaire et la relance par l’investissement dans les infrastructures stratégiques, l’innovation et la recherche. Une fois que l’on a compris que la rigueur la plus saine est la bonne gestion des dépenses publiques dans le souci de la simplicité, de l’efficacité et de la recherche des rouages et missions inutiles ou redondantes, une fois que l’on aura compris que ce n’est pas celle des mesures diminuant notre pouvoir d’achat ou nos possibilités d’acquisition, on aura fait un grand pas. Ce pas n’est toujours pas franchi.

La conservation de la note AAA n’est ni un but en soi

ni l’obligation de suivre une route unique imposée de l’extérieur.

L’indépendance d’un pays vaut tous les sacrifices !

« - Il importe si bien, que de tous vos repas
Je ne veux en aucune sorte,
Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor. "
Cela dit, maître Loup s'enfuit, et court encor. »
La Fontaine (Le loup et le chien)
Claude Trouvé