lundi 8 août 2011

Les Etats-Unis sombrent les premiers... la France c'est pour quand ?

La note AAA est perdue pour la première puissance économique du monde. Depuis quelques mois le dollar et l’euro font un étrange ballet où ce dernier est le jouet de la politique monétaire américaine et des marchés. Mais il apparaît de plus en plus que les États sont à la remorque des masses monétaires circulantes au gré des investisseurs, banquiers, fonds de pension, grandes entreprises, etc. et des agences de notation. Tout cet argent est investi dans des opérations bancaires et financières dont l’opacité se construit dans la complexité et les paradis fiscaux.

De plus la cessation de la convertibilité fixe en or des monnaies a donné l’occasion aux États-Unis de profiter de leur monnaie de référence pour créer un endettement cinq fois plus important que celui de la France. Cette masse monétaire, déconnectée d’une réalité monétaire tangible, est source de tous les déséquilibres. Son poids pèse lourd dans l’économie mondiale, même si sa dette/habitant est largement inférieure à France. Le phénomène déclencheur, de dépassement de la dette permise, n’est que le révélateur de l’accroissement annuel brutal de la dette américaine.

Ce qui devait arriver arrive et la seule interrogation était : le dollar ou l’euro en premier ?

On aurait tort de penser que la France est à l’abri d’une sanction des agences de notation. Si le maintien jusqu’à hier de la note AAA pour les États-Unis paraissait surfait, celui de la France pourrait s’avérer avoir la même enflure ! Les agences de notation se livrent à des appréciations complexes à base de données concrètes et de sentiment sur la capacité des gouvernants et de leurs peuples à tenir la note, entre autres.

Jusqu’à ce jour nous avons présenté une face assez respectable apparemment. En fait notre collusion avec l’Allemagne politique voulue depuis François Mitterrand et perpétrée par Nicolas Sarkozy nous protège plus que nos indicateurs économiques. Toucher l’un de ces deux partenaires crée un cataclysme européen avec des répercussions mondiales à cause de la puissance commerciale de l’Europe. L’euro-mark ne résiste que tant que l’Allemagne consent à aider les pays en difficulté et tant que la France calque sa politique budgétaire sur la sienne tout en étant son premier client.

Si les arcanes des réflexions des agences de notation sont difficiles à percer, cela ne nous empêche pas de jeter un regard personnel sur la réalité de notre dette. Un bon moyen est de se comparer aux autres pays selon des critères simples. Le tableau ci-dessous réunit deux types d’informations, trois informations sur la dette et une sur le chômage. En effet le principal signe de santé d’un pays est son taux de chômage. Le tableau porte sur 27 pays de l’OCDE avec les chiffres les plus récents évalués pour mi-2011 mais évidemment contestables.

Dette/hab Dette/PIB Augmentation annuelle  de la dette Chômage
Suisse 23185 39,0% -7,5% 3,9%
Norvège 37894 45,4% -3,2% 14,2%
Pays-Bas 28791 63,3% - 7,4%
Hongrie 9069 72,2% -8,8% 9,9%
Allemagne 27599 76,7% -3,0% 8,0%
Australie 11846 22,5% 4,9% 0,5%
Autriche 29845 70,8% 1,0% 0,0%
Suède 17454 39,2% 2,2% 7,5%
Belgique 41138 99,1% -3,4% 0,0%
Italie 37163 119,7% -4,1% 4,6%
Danemark 23602 45,3% 5,1% 3,4%
Luxembourg 16604 15,8% 19,5% 4,5%
Islande 42855 129,2% -0,4% 0,0%
Finlande 21307 52,8% 6,4% 12,2%
France 32684 86,6% 1,7% 4,1%
Canada 38178 82,1% 5,1% 0,0%
Pologne 6381 52,2% 8,5% 13,4%
Portugal 16602 81,2% 1,6% 12,2%
Royaume-Uni 28823 79,6% 10,9% 7,7%
Grèce 34034 134,3% -1,7% 15,0%
République Tchèque 6643 37,3% 11,5% 13,4%
Japon 86057 199,8% 4,2% 4,6%
Irlande 37909 84,9% 6,8% 14,2%
Slovénie 8675 36,9% 23,3% 8,4%
États-Unis 32870 67,7% 17,2% 9,2%
Espagne 19031 68,8%   9,0%  21,0%

Un tableau de ce type est peu lisible même si certains chiffres sont parlants comme la dette en PIB/hab. de la Grèce, de l’Islande, de l’Italie et du Japon.

Le graphique joint présente ces informations sous une forme condensée. Une note de 0 à 20 a été attribuée sur les barres bleues pour une « moyenne » des notes obtenues sur chacun des trois critères de la dette (Dette/hab., Dette/PIB, augmentation annuelle de la dette). Une note de 0 à 20 a été figurée sur les barres rouges pour une « moyenne » du facteur globalisé dette et du chômage.


Le classement des pays est fait selon la deuxième note globale. La France a dans les deux cas une position moyenne un peu inattendue car elle est devancée par la plupart des pays européens sauf la Pologne, le Portugal, le Royaume-Uni, la Grèce, l’Irlande, la Slovénie et l’Espagne. Mais la surprise vient de l’Italie que l’on dit si mal en point et qui obtient une note au-dessus de la moyenne malgré le poids de sa dette. La différence avec la France vient essentiellement de son taux de résorption de sa dette de -4,1%, alors que nous affichons un pourcentage d’augmentation de +1,7%, et d’un chômage inférieur.

L’Italie sera-t-elle capable de tenir ce taux ? L’abaissement de sa note ne va pas lui faciliter les choses. Du coup on peut s’inquiéter de notre place dans ce classement. Dans les pays derrière nous, la Pologne doit son mauvais classement par une dérive de l’augmentation annuelle de sa dette. La Grèce est en fait plombée par son taux de chômage et l’ampleur de sa dette plus que par la dérive de celle-ci. Une simple dévaluation aurait sans doute suffit pour la remettre à flot, mais grâce à l’euro elle peut nous entraîner dans sa chute ! C’est moins le cas pour l’Espagne dernière de ce classement, augmentation suicidaire de la dette publique et chômage demandent une autre politique.

Seuls des pays nordiques, la Pologne, l’Irlande et le Royaume-Uni se classent derrière nous à cause d’une dérive annuelle très importante de leurs dettes. On ne s’étonnera pas de trouver les États-Unis en avant-dernière position et un Japon très mal placé.

Parmi les premiers de la classe, hors la Pologne, on retrouve tous les pays du nord, comme quoi le froid protège plus que l’euro ! Là encore la réduction en cours de la dette de l’Islande et de son taux de chômage inférieur à celui de la zone euro lui permet d’acquérir une note favorable.

Loin derrière la Suisse, les Pays-Bas, la modeste Hongrie, l’Allemagne et même l’Autriche, la France obtient tout juste la note 10, guère mieux placée que le Portugal. Évidemment on pourrait trouver d’autres indicateurs qui changeraient le classement. Néanmoins on ne peut que constater que sur des indicateurs aussi fondamentaux notre pays se place en zone de risque.

Cette petite étude n’engage évidemment que son auteur, mais son but n’est que d’apporter un élément de réflexion qui sorte des vérités que l’on nous assène par tous les médias en donnant un éclairage un peu différent. Au-delà de toutes les affirmations, souvent intéressées ou "aseptisantes", que nous recevons, il est toujours salutaire de se faire notre propre opinion.

En conclusion les agences de notation font un peu la pluie et le beau temps puisqu’elles introduisent des données subjectives. L’influence de celles-ci, des marchés et de la circulation des capitaux peuvent à tout moment mettre un pays en difficulté dès que les fondamentaux de son économie ne sont pas sains. Justement la France se signale par des fondamentaux fragiles en particulier sur le chômage et la dette/hab. Elle devra prouver qu’elle tient ses promesses dans la réduction de l’impasse budgétaire.

La chute des États-Unis peut la favoriser un temps en reportant vers elle les capitaux circulants mais sa fragilité est congénitale et sa compétitivité n’est pas à la hauteur du marché mondial.

Tant que l’Allemagne soutiendra l’euro, nous tiendrons. Il ne reste plus qu’à manger dans sa main.

C’est ce que nous ont concocté Jacques Delors, François Mitterrand et Helmut Kohl. L’humiliation de juin 40 est en marche, et De Gaulle est mort en emportant l’idée de l’Europe des nations.

Construisons vite l’Europe des peuples

mais reprenons en main notre indépendance économique et notre monnaie !

Car un peuple qui ne croit plus que dans les autres est déjà à demi-mort !