vendredi 12 août 2011

Le langage du n’importe quoi…

Billet d’humeur

Dépêche AFP :
« Le ministre de l'Economie François Baroin a assuré que sur l'ensemble de l'année 2011, la croissance serait "en ligne" avec l'objectif que s'est fixé le gouvernement, soit 2% de progression du produit intérieur brut (PIB).



Il s'est également dit "très confiant" face aux mouvements à la Bourse de Paris puisque l'économie française avait de bons fondamentaux. »


Il va falloir que notre ministre nous explique, à nous pauvres ignares du peuple d’en bas, ce que sont les fondamentaux de l’économie française ! On croit rêver en effet devant tant de malhonnêteté, car il ne peut s’agir d’ignorance, même si on peut brandir l’excuse du nécessaire langage destiné à éviter toute panique du consommateur et épargnant français. Je ne pense pas par contre que de tels propos soient de nature à calmer les investisseurs de tout poil, les autres états et les agences de notation.

La chasse aux niches fiscales est ouverte et le gibier serait tellement abondant que celle-ci va être indolore. On va pouvoir augmenter les rentrées fiscales sans toucher aux impôts et taxes, surtout pas à la TVA pour raison électorale. Qui peut croire à ce discours alors que notre commerce extérieur va être déficitaire d’une dizaine de milliards supplémentaires en 2011 ? Les taxes qui vont manquer, les prendra-t-on dans l’épargne française dont on dit qu’elle est pléthorique mais surtout réinvestie à l’étranger par les banquiers ?

Les chiffres parlent d’eux-mêmes. La balance commerciale française est très déficitaire d’une cinquantaine de milliards d’euros en 2010, son écart négatif avec l’Allemagne est de l’ordre de 200 milliards d’euros. Le déficit et l’écart avec l’Allemagne va encore se creuser en 2011. Après une croissance du PIB de +0.9% au premier trimestre, celle-ci est devenue nulle au deuxième trimestre soit 0,45% moyen pour le semestre. Le troisième trimestre ne se caractérisant pas par une activité accrue pendant les vacances estivales, il est peu vraisemblable que les 2% de croissance du budget de François Baroin soient atteints. La banque de France vient d’ailleurs de faire une prévision de croissance de 0,2% au troisième trimestre qui peut déjà paraître optimiste dans le climat actuel.

Les 1,1% de croissance nécessaires du deuxième trimestre sont d’autant plus difficiles à obtenir que la stagnation menace en Europe et aux Etats-Unis. D’ailleurs la croissance de la consommation intérieure du deuxième trimestre a reculé de -0,7% et le capital mis dans l’investissement a aussi décéléré. Or l’essentiel du moteur économique français est la consommation intérieure ! Si sur ce deuxième trimestre nos exportations se sont stabilisées, les importations ont diminué de -0,9%. C’est bien le signe d’une réduction du pouvoir d’achat des acteurs économiques qui va se traduire par des rentrées fiscales moins importantes.

On n’a pas des fondamentaux sains de l’économie française quand le moteur de la croissance est grippé par des exportations qui ne croissent même pas au niveau de l’inflation, une consommation intérieure en berne et qui voit approcher la rigueur à grands pas, rognant encore sur le pouvoir d’achat des ménages. Elle ne l’a surtout pas au regard de notre voisin et principal fournisseur, l’Allemagne qui est en passe de réduire sa dette, fait reculer le chômage, d’ailleurs déjà de 50% inférieur au nôtre, et affiche un taux de croissance très supérieur dépassant même ses propres prévisions.

L’emploi devait être devenu la priorité de ce gouvernement. Malheureusement la rigueur nous est imposée implacablement par l’UE et les agences de notation. Elle ne peut aller dans le sens de l’emploi par simple effet naturel, bien au contraire. Cela nécessite une politique de relance de notre activité économique, soit par des investissements massifs dans la recherche et le lien accru université-industrie, le soutien au tissu industriel innovant localisé en France, la formation aux métiers utiles à la consommation intérieure et à l’exportation, la reconstruction du tissu industriel, des investissements dans les infrastructures utiles au développement économique, etc.(ceci est très bien analysé dans l'article de notre secrétaire général Patrick Louis), soit en y ajoutant une sortie programmée du carcan de l’euro.

Malgré l’accalmie boursière, l’économie américaine reste terne et nous entrons dans une ère de stagnation voire de récession. Elle durera le temps que l’économie mondiale recrache les effets des abus de la mondialisation. La France, comme la Grèce, l’Italie, l’Irlande, l’Espagne, la Grande-Bretagne et d’autres pays fragilisés ne peuvent espérer réduire leur dette publique et retrouver une croissance supérieure à l’inflation par la seule rigueur imposée aux budgets, laquelle peut s’avérer destructrice si elle va trop loin ou trop vite. Les peuples ne peuvent pas supporter des charges trop lourdes sur leurs épaules pour des erreurs économiques des états qui en sont les seuls responsables. Cela conduirait inévitablement à des conflits sociaux qui plomberaient encore plus tout espoir de réussite des plans de retour à l’équilibre.

De plus quand les français et d’autres peuples européens ont tenté par leur vote de faire savoir que les orientations européennes étaient scabreuses, on a bien vite trouvé le moyen de ne pas les écouter et de les endormir en leur chantant l’Europe heureuse et aujourd’hui en leur scandant que changer serait pire. Ce postulat est répété jusqu’à plus soif (méthode communiste) dans les discours entendus depuis quarante ans. On en voit désormais clairement les effets bienfaiteurs ! Pourtant on continue car demain on rase gratis !

De Gaulle disait que les français étaient des « veaux », ce qui n’impliquait pas qu’ils soient « bêtes » au sens figuré du terme, mais les veaux vont finir par foncer bêtement dans le tas à force d’agiter un chiffon vachement rouge qu’on leur fait croire blanc comme neige. Pourvu que le chiffon ne devienne pas alors vraiment rouge de sang… comme en Grande-Bretagne ces derniers jours.

Quand aurons-nous des dirigeants capables de dire la vérité,
des partis conscients de leur collective participation dans les erreurs,
responsables et coupables devant le peuple,
 et enfin unis pour en affronter les conséquences… ?

Dans une autre vie ?